Patrick Vaccari et Charles d'Huyvetter. (Photo J. P.)
Les responsables de Très Grande Vigilance en Albret réagissent suite à la décision, certes attendue, du ministère des Transports de valider le tracé Sud accordant la réalisation d'un tunnel à Moirax.
Agen Par Maryan Charruau
«La décision du ministère des Transports de valider le tracé sud de la LGV Bordeaux-Toulouse ne nous surprend pas (1). Elle entre dans la logique du comité de pilotage du Grand projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO) tenu le 9 janvier. Rien de nouveau, sinon que pour nous le combat continue. Rien n'est joué. Et beaucoup de questions se posent. Reste que ce processus de manipulation nous met dans une colère… », préviennent Pierre Vaccari et Charles d'Huyvetter, responsables de Très Grande Vigilance en Albret. Cette association fait partie de la Coordination 47 qui milite pour la rénovation des voies existantes.
« Sud Ouest ». Quel est votre sentiment suite à la décision ministérielle ?
Pierre Vaccari et Charles d'Huyvetter. Le gouvernement a manqué de pudeur et d'élégance avec cette annonce à deux semaines de la présidentielle. Quand on connaît les incertitudes du scrutin ! Ce qui est gênant, c'est que la décision donne aussi son accord pour les acquisitions foncières et la prévision de déboisement alors que beaucoup de collectivités ne se sont pas encore prononcées sur le tracé. Le président du Conseil général de Lot-et-Garonne a dit qu'il demanderait à son assemblée le 25 juin de refuser de participer au financement de la Bordeaux-Toulouse. Et la facture s'est alourdie de 80 millions d'euros avec le tracé Sud qui englobe le H226 (tunnel à Moirax), que personne ne veut payer. Nul ne dit qui va financer, et comme personne n'a de l'argent ! Quand on sait que la dernière enquête Insee montre qu'un Lot-et-Garonnais sur six vit en dessous du seuil de pauvreté…
Quel est le sens de votre combat ?
Nous voulons que chacun prenne conscience des enjeux de la LGV, ne serait-ce qu'en terme économique. Si l'on nous démontre que nous nous trompons, nous reverrons notre position. Mais tous les indicateurs montrent que nous avons raison. Si la LGV va servir Bordeaux et sans doute Toulouse, là c'est à prouver, il faut apprécier ce qui s'est passé dans le Nord, en Picardie en Rhônes-Alpes et ailleurs. Les zones traversées ne bénéficient pas de l'impact LGV. Celle-ci ne gêne pas l'activité, mais elle n'apporte rien.
Qu'est-ce qui vous gène dans la démarche engagée par l'État ?
C'est le processus même de validation car il entraîne, notamment, la mise à jour d'une future expropriation. Quant au financement, on dit : ''On fait, et on verra comment on paie''. Allez voir votre banquier, s'il vous encourage à agir ainsi ! C'est un processus de manipulation. Nous sommes gênés aussi pour tous les experts qui ont planché pendant trois mois à l'automne lors des assises ferroviaires. Leurs conclusions montraient que la France s'était trompée depuis 1990 avec le TGV. Le 15 décembre, la ministre Nathalie Kosciusko-Morizet dit : ''On stoppe tout, à l'exception de quatre projets engagés : Tours-Bordeaux, Bretagne/Pays de la Loire, contournements de Nîmes et de Montpellier et 2e tranche du TGV-Est''. Pour les autres projets, elle appelle alors à un moratoire et demande une étude socio-économique. Quelques jours plus tard, elle cède devant la pression de MM. Malvy et Rousset, présidents de Midi-Pyrénées et d'Aquitaine, et des Chambres de commerce et d'industrie. Tout est annulé, détourné.
Vous n'appréciez pas Alain Rousset, pourquoi ?
Les raisons sont multiples. Une de ses décisions coûte déjà cher aux conducteurs aquitains. Certes de manière légale, via l'article 12 de la Taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) du Grenelle de l'environnement, depuis le 1er janvier 2011, quand vous faites le plein, vous êtes ponctionné pour la LGV : 73 cents par litre pour du Super 95 ou 98, et 1,35 euro par litre de gasoil. Cela a rapporté 35 millions d'euros en 2011 pour un projet qui n'existe pas.
Quelles seront vos prochaines actions ?
Nous avons adressé une lettre à tous les élus de la Communauté d'Agglomération d'Agen. Nous sommes prêts à les rencontrer pour expliquer nos arguments. Nous demandons un débat public avec Réseau ferré de France (RFF) qui s'est déjà défilé. Nous distribuons un petit livret expliquant notre démarche et ce avec les références avancées par RFF. Notre travail est sérieux et digne d'être entendu.
(1) « Sud Ouest », samedi 7 avril.