Le projet de construction de la nouvelle station d'épuration de Saint-Pée-sur-Nivelle interroge les riverains. Les collectivités répondent que les travaux sont inévitables.
22 MAR. 2022 - 07:25h
Willy Roux
Les Jeannou, à l'emplacement prévu de la station, à quelques dizaines de mètres de leur hôtel. (© Guillaume FAUVEAU)
Depuis près de dix ans, l'agglo Sud Pays Basque, puis la Communauté d’agglomération Pays Basque portent le projet de la construction d’une nouvelle station de traitement des eaux usées (STEU) à Saint-Pée-sur-Nivelle. Alors que les travaux de construction, qui devraient durer 18 mois, pourraient démarrer avant l’été, les riverains du quartier Helbarron et notamment les gérants de l’Hôtel des Pyrénées-Atlantiques s’inquiètent des conséquences d’une station d'épuration « sous leurs fenêtres ».
« Ce nouveau bâtiment de 11 mètres de haut avec un remblai de 4,5 mètres sera à 80 mètres de notre hôtel et visible de la moitié des 34 chambres de l’établissement. C’est une moins-value pour notre patrimoine comme pour les 12 villas voisines. Notre commerce est foutu », se désole Jean-Charles Jeannou, gérant de cet hôtel ouvert en 1965 au bord de la D918 à quelques encablures de la Nivelle. On nous assure qu’il n’y aura pas de bruit ni d’odeur mais la pollution visuelle sera bien présente. Dire que nous avons investi 800 000 euros de travaux depuis 2016, date de concrétisation du projet... ». Après deux années de pandémie, les gérants estiment détenir un commerce dans un « état critique ».
Un projet « indispensable » pour le territoire
Le maire de Saint-Pée-sur-Nivelle, Dominique Idiart, rappelle le caractère « indispensable » du projet financé à hauteur de 9 millions d'euros par l'Agglo. Pour lui, la capacité de passer de 15 000 à 20 000 équivalent-habitants pour la nouvelle usine limitera la pollution et répondra aux besoins du territoire, en particulier en période estivale. Surtout, une partie de l’ancienne station d’épuration datant de 1975, située dans le même secteur que la future, était devenue obsolète après avoir été endommagée lors de la crue de 2007.
Le premier édile rappelle aussi que dès l’achat du terrain de l’ancien camping en 2012, ce dernier avait été fléché pour accueillir la nouvelle station d’épuration. Si le projet initial était de construire à la place de l’ancienne usine, plus loin de l’hôtel mais plus proche de la Nivelle, il a été décidé de construire la nouvelle STEU plus haut car « plus on se rapproche de la route moins la zone est inondable ». Le secteur reste néanmoins en rouge écarlate sur la carte des zones inondables, d'où l'apport d'un important remblai avant la construction, mais aussi l'inquiétude des riverains en cas de nouvelle crue. « Le goulot de la Nivelle à cet endroit va obligatoirement être restreint par cette construction immense, qui elle sera protégée par son remblai de 4,50 mètres mais, nous riverains, qui nous protégera ? », interroge le gérant de l’hôtel.
Station d'épuration de Saint-Pée La station serait visible depuis la moitié des 34 chambres de l'hôtel. © G. FAUVEAU
Une pétition en ligne
« De nombreuses études montrent que c’est l’endroit le moins 'impactant' par rapport aux inondations et il se trouve dans la continuité de tous les réseaux, ce qui évite un surcoût pour les raccorder. Si nous avions trouvé un autre endroit, il y aurait d’autres mécontents. Nous allons essayer de reboiser et ajouter une haie végétale entre l’hôtel et l’usine et un espace boisé sera maintenu. Seul le bâtiment sera visible de l’hôtel mais pas les cuves », justifie le maire de Saint-Pée.
Des propositions insuffisantes pour les riverains, qui ont lancé une pétition contre le projet, et qui a déjà recueilli 356 signatures. Pour la Communauté d'agglomération Pays Basque (CAPB), « aucune indemnisation n’est prévue pour ce projet » de restructuration du système d’assainissement, déclaré d’utilité publique par un arrêté préfectoral en août 2016.
Pour rassurer les riverains, la CAPB avance avoir initié auprès du tribunal administratif de Pau une ordonnance en référé préventif avec désignation d’un expert judiciaire afin de procéder, avant le démarrage et lors de l’exécution de ces travaux, à toutes constations relative à l’état des immeubles avoisinants. Une procédure visant à défendre l’intérêt des riverains.
Pour obtenir des réponses à leurs interrogations, ces derniers, avec les propriétaires de l’hôtel, sont invités le 5 avril prochain à une réunion publique en présence de Maider Arosteguy, déléguée communautaire en charge de l’assainissement. Contacté par les opposants au projet, le sous-préfet, Philippe Le Moing-Surzur, leur suggère « de profiter de cet échange pour faire valoir les conséquences que porterait un tel projet sur [leur] activité s'il aboutissait dans les formes actuellement présentées ».
« Aucun document ne nous a été fourni, c’est étrange »
Avant l’obtention de ce rendez-vous, les riverains reprochaient aux collectivités de ne pas avoir suffisamment communiqué sur le projet, et à la mairie d’avoir installé le permis de construire au fond du terrain en novembre 2020 en plein confinement, pour « faire le moins de bruit possible ». « Aucun document, que ce soit les enquêtes publiques ou les documents sur les risques d’inondations ne nous a été fourni, c’est étrange », pointe Anne-Marie Jeannou, copropriétaire de l’hôtel.
Les collectivités répondent à cela que le projet a été exposé aux usagers par le biais d’enquêtes publiques, d’affichage dans les journaux et en mairie et sur le site internet de la préfecture des Pyrénées-Atlantiques, comme le veut la loi.