Par Lionel Steinmann | 24/09 | 07:00 |
L'entreprise se dit prête, dans le cadre de la réforme préparée par les pouvoirs publics, à reprendre une partie de la dette de 30 milliards portée par Réseau Ferré de France, en échange d'une participation à sa gouvernance. Les usagers des trains régionaux et l'Etat seraient aussi mis à contribution.
Certes, la SNCF n'a pas vocation à définir la politique publique des transports. Ses dirigeants l'ont rappelé à plusieurs reprises en fin de semaine dernière lors du séminaire de presse organisé par l'entreprise à Berlin, cette tâche incombe au gouvernement. Pour autant, alors que celui-ci s'apprête à annoncer début octobre les grandes lignes de sa future réforme ferroviaire, l'entreprise publique a des propositions à faire, la plus neuve d'entre elles portant sur le traitement de la dette du système.
Si la nécessité d'une reforme fait consensus, c'est bien en effet parce que le système ferroviaire va financièrement dans le mur. Réseau Ferré de France, le propriétaire des infrastructures, qui avait hérité à sa création en 1997 de la dette de la SNCF, voit celle-ci augmenter de 1 à 1,5 milliard par an ! Elle a atteint 29,6 milliards fin juin, et deviendra insoutenable si rien n'est fait
Dans ce contexte, la SNCF propose, dans le cadre d'une réforme globale, un « pacte national pour le rail », qui reviendrait à répartir les efforts pour résorber cette dette entre trois acteurs. Le premier est la SNCF elle-même : « Nous avons les moyens de reprendre une partie de la dette historique à notre compte », explique Sophie Boissard, la directrice générale déléguée en charge de la stratégie, sans davantage de précision. Selon un acteur du dossier, cette part varierait entre 5 et 10 milliards. Les clients seraient eux aussi sollicités, par le biais d'une augmentation du prix des billets. Les tarifs des TGV laissant selon l'entreprise peu de marge, ce sont les usagers des transports régionaux qui subiraient la principale hausse. Enfin, la « collectivité nationale », c'est-à-dire l'Etat, reprendrait le solde de la dette via une « contribution extraordinaire ».
En échange de sa participation au redressement des finances du système, la SNCF réclame d'« avoir voix au chapitre », selon l'expression de Sophie Boissard, dans la gestion des infrastructures, aujourd'hui confiée à RFF. Elle confirme là sa volonté de se poser en « pivot » du système, en réintégrant dans son giron une partie des tâches aujourd'hui dévolues à RFF.
Avec ce « pacte national », la direction de la SNCF entend faire coup double. Avec sa propre contribution, elle signifie qu'elle mérite la place centrale qu'elle revendique dans le futur système. Et avec celles des usagers et de l'Etat, elle se donne des arguments pour expliquer en interne que l'entreprise ne peut pas s'exonérer d'efforts (voir ci-dessous).
« Contribution extraordinaire »
Rien ne dit toutefois que cette « vision » de la SNCF convaincra le gouvernement. La perspective d'une hausse sensible des tarifs des TER est un sujet très sensible politiquement, tout comme l'est, au niveau financier, celui d'un accroissement de la dette de l'Etat par cette « contribution extraordinaire ».
Dans l'attente des arbitrages gouvernementaux, la SNCF s'applique en tout cas à se poser en bon élève. « Nous devons être un service public exemplaire », plaide Guillaume Pepy. Le président de l'établissement public a ainsi annoncé lors du séminaire que les effectifs (159.000 salariés fin 2011) ne diminueraient pas cette année, une première depuis des décennies. Le budget 2012 prévoyait pourtant 900 suppressions de postes. De surcroît, la SNCF embauchera 500 contrats d'avenir dès que la loi sera votée. Des annonces, alors que le chômage continue d'augmenter, qui ne manqueront pas d'être appréciées à l'Elysée.
(À BERLIN)
Lionel steinmann
(À BERLIN)
Lionel steinmann
Cap sur 2017
La SNCF a dévoilé, lors de son séminaire de presse à Berlin, les principaux objectifs de son plan stratégique 2013-2017 :
une progression annuelle moyenne de 3,5 % du chiffre d'affaires, pour atteindre 40 milliards d'euros en 2017, contre 32,6 milliards en 2011 ;
une part de l'activité à l'international supérieure à 30 % (23 % l'an dernier) ;
une marge opérationnelle de 4 milliards, contre un peu plus de 3 milliards d'euros aujourd'hui ;
un endettement maîtrisé, ramené à 6 milliards d'euros en 2017, contre 8,3 milliards en 2011.