Par Victor Pachon, porte parole du CADE La récente décision de Mme Alliot Marie de suspendre le projet de nouvelle LGV au Pays Basque a déclenché un tir de barrage impressionnant. Alain (Rousset), Alain (Juppé) et Alain (Lamassourre) sont montés au créneau avec leur ami de la CCI Pays Basque et Région M. Berckmans. Dans le tintamarre, on a vite écarté les associations qui ont pourtant nourri les quinze dernières années d’une réflexion aujourd’hui retenue par MAM. Si en Pays Basque le Collectif des Associations de Défense de l’Environnement Pays Basque et Sud des Landes et les associations opposées à la LGV ont encore droit de cité dans la presse que nous appelons institutionnelle, ce n’est guère le cas au niveau régional où le journal Sud-Ouest a fourni gratuitement, trois jours de rang deux pages de publi-reportage aux proTGV. « Les faits sont sacrés, les commentaires sont libres.» a-t-on coutume de dire dans ce grand quotidien régional. Alors, c’est sans doute au titre de fait sacré qu’on y affirme : « Au Pays Basque par exemple, si on conservait une ligne classique entre Bayonne et l’Espagne, on perdrait 40 mn par rapport à une LGV ». Comme, actuellement, le plus lent des TGV qui passent aujourd’hui entre Bayonne et l’Espagne met 35 mn et le plus rapide 28mn, en gagnant 40 mn on peut donc considérer que les « faits sacrés » inventent le premier TGV qui arrive avant de partir. On continue également, malgré une réalité qui s’impose jour après jour à clamer comme une incantation, qu’en 2020 la nouvelle ligne capterait 20 millions de tonnes de marchandises, alors qu’on peut lire dans les études jointes du CDRom officiel, que l’hypothèse haute prévoit 13 millions de t/an à Hendaye en 2020 et que le tableau de marche lisible sur un graphique joint indique 7,5 millions de tonnes en 2008. Mais les résultats réels eux donnent, après une vingtaine d’années légèrement au dessus de 2 millions de t/an à Hendaye, un plongeon en dessous de 2 millions fin 2008. Mais la palme revient sans doute à M. Berckmans. Il nous explique : « Aujourd’hui, 2% du trafic transfrontalier transitent par le fer, mais dès 2014, la proportion atteindra ce qu’elle est à la frontière italienne, c'est-à-dire 20% ». D’abord ce n’est pas le trafic mais le tonnage de marchandises qu’il faut dire cher monsieur, sinon on passerait de 53 trains quotidiens aujourd’hui (sur une ligne qui peut en accueillir 264) à 530 et ce sont plusieurs lignes nouvelles qu’il faudrait construire. Ensuite il faut être plus précis quand on veut donner des leçons et dire : aujourd’hui le trafic maritime capte 52% du tonnage de marchandises, la route 46% et le fer 2% au passage du Pays Basque. A la frontière italienne Alpine (axe Lyon-Turin) la route capte 80% et le fer 20% et il n’y a pas de trafic maritime dans les cols des Alpes ce qui fait une sacrée différence non ? L’absence de concurrence maritime sur les transports massifs explique la différence avec le Pays Basque, calquer les deux situations c’est faire preuve de stupidité ou de mauvaise foi, et comme je sais que M BercKmans peut être intelligent il ne me reste qu’à opter pour la deuxième possibilité. Nous n’atteindrons évidemment pas ces 20%. Et d’où viendraient subitement en 2014 cette multiplication des marchandises ? « Le trafic de fret sera donc multiplié immédiatement par 7 parce que du côté espagnol, la voie sera mise à écartement européen » nous dit-il. Passons sur le fait que de 2 à 20 c’est une multiplication par 10 et non par 7 et concentrons nous sur le sujet. La mise à écartement européen du réseau classique de l’état espagnol n’est pas au rendez-vous, la promesse n’est pas tenue et sera pas tenue et le rapporteur européen Etienne Davignon dans son rapport de juillet 2008 met le doigt dessus en menaçant : « Cette inconnue pourrait ainsi peser lourd dans le choix final des autorités françaises. » Il relèvera aussi l’incohérence du projet principalement voyageurs au Sud de la Bidassoa et principalement marchandises au Nord. Il ajoutera ce bas de page que je livre à M. Berckmans : « La ligne existante est loin d'avoir atteint un niveau de saturation et ses caractéristiques géométriques sont plutôt bonnes, même si l'armement de la voie, le système de signalisation et d'électrification ne sont pas des plus récents. » Enfin M. Berckmans nous livre un tableau apocalyptique du Pays Basque sans TGV dans le JPB du samedi 13 : « Comment peut-on imaginer que la ligne actuelle, construite en 1842, à une époque où Bayonne comptait 17 000 habitants et Biarritz 1 800, puisse supporter le futur TGV, l'accroissement inévitable du trafic de marchandises généré par le nouvel écartement du chemin de fer espagnol… » Ainsi donc la modernisation de la voie existante serait un retour à 1842, l’enfer s’abattrait sur nous, le temps de la charrette serait de retour, les populations jetées dans la misère, les enfants abandonnés dévorés par les loups … Cette ligne de 1842 a tout de même été électrifiée, modernisée au fil des ans, elle bénéficie de la signalisation des Blocs Automatiques Lumineux, installée à partir de 1946 (pas sur Dax-Bayonne), de l’IPCS (Indication Permanente de Contre Sens) et autres gadgets modernes et elle sera modernisée par des travaux qui vont débuter ces prochains mois (portant sa capacité marchandises à 12 millions de t/an). Ce qui n’a pas été mis en route (ou si peu) depuis 1842, ce sont les protections des riverains dont M. Berckmans découvre aujourd’hui qu’elles sont nécessaires mais que nous réclamons depuis longtemps. Riverains pour lesquels la mise en place des trains longs de marchandises (que nous réclamions en vain lors du débat, qu’on nous a refusé alors et qui vient d’être imposée par le grenelle de l’Environnement) aboutira à au moins une division par deux du nombre de ces trains. Pour terminer disons simplement que le 7 juin, le lendemain d’une publicité proTGV payée par les CCI d’Aquitaine occupant entièrement la page 2 du journal Pays Basque de Sud Ouest, les électeurs de Lahonce, St Pierre d’Irube et Villefranque ont rejeté massivement la nouvelle LGV avec respectivement 80,8%, 92,68% et 93,9% de nons s’ajoutant aux 91,3% de Mouguerre et aux 92,05% d’Ustaritz l’année précédente. Et ces faits sacrés là il faut aussi les entendre un jour ! |