Début juillet, l'Agglo révélait une « forte augmentation » de la micro-algue Ostreopsis sur la côte basque. Depuis, plus aucune communication n’a été faite, malgré « un niveau de surveillance quotidien » et alors que l’algue toxique semble bel et bien là.
22 AOûT 2022 - 07:15h
Félix Thommen
Plusieurs sauveteurs et surfeurs affirment avoir été intoxiqués par l'Ostreopsis cet été. (© Patxi BELTZAIZ)
Ostreopsis ovata, ce nom les Basques commencent à bien le connaître. Installée dans les eaux chaudes de Méditerranée depuis une vingtaine d’années, cette micro-algue toxique a fait une apparition remarquée l’année dernière sur le sud de la côte atlantique. Gêne respiratoire, toux, fièvre, manifestations cutanées, maux de gorge ou de tête, durant l’été 2021, sa présence avait contraint les communes de Biarritz, Saint-Jean-de-Luz et Bidart à fermer provisoirement leurs plages et 800 cas de contaminations avaient été recensés.
« Tout va bien »
Alors, où en est-on un an plus tard ? Le 9 juillet dernier, la Communauté d’agglomération Pays Basque (CAPB) indiquait que « des prélèvements d’eau et d’algues réalisés ces derniers jours […] révélaient une forte augmentation de la concentration de la micro-algue Ostreopsis (30 000 cellules par litre), justifiant le passage à un niveau de surveillance quotidien ». Depuis, « tout va bien », rassure Emmanuel Alzuri, conseiller délégué à l'assainissement et aux eaux pluviales à la CAPB. « Les analyses montraient qu’il y avait de l’algue Ostreopsis mais heureusement pour nous, ce n’était pas la souche ovata, qui est la souche agressive, mais la souche siamensis, qui ne pose pas de problème », poursuit celui qui est également maire de Bidart. Circulez, il n’y a rien à voir...
Pourtant, sur les réseaux sociaux, ils sont quelques-uns, des surfeurs locaux pour la plupart, à penser le contraire et à dénoncer un manque d’information de la part de l’Agglo. Jamais avare de petites piques dès lors que le sujet de la qualité des eaux de baignade est mis sur la table, le médecin généraliste et élu d’opposition biarrot, Guillaume Barucq, regrette de ne pas avoir accès aux résultats des analyses. « Alors que je suis médecin et élu local, on ne me donne pas ces informations, dit-il. J’ai déjà vu passer plusieurs cas suspects dans mon cabinet. Mais comme je suis incapable de savoir la quantité d’algues qu’il y avait sur telle ou telle plage à un instant T, je ne peux pas poser de diagnostic ». Les symptômes d’une intoxication à l’Ostreopsis sont effet proches de ceux de la grippe ou d’une bronchite asthmatiforme.
« On a tous été malades »
Ces informations, il semblerait qu’ils ne soient qu’une poignée à pouvoir les consulter régulièrement. En allant toquer à la porte des postes de secours biarrots, nous apprenons que les chefs de poste ont demandé à ce que les relevés leurs soient communiqués quotidiennement. Preuve, sans doute, d’une certaine défiance vis-à-vis de cette algue bien qu’aucune directive ne leur ait été donnée pour éventuellement interdire la baignade.
Il faut dire que les maîtres-nageurs-sauveteurs (MNS) de Biarritz ont de quoi se montrer méfiants. À la plage du Port-Vieux, l’un d’eux assure qu’ils ont « tous été malades » et que deux de ses collègues sont en arrêt maladie. Au début du mois, la concentration de micro-algues aurait été de 490 000 cellules par litre au niveau du Rocher de la Vierge, puis de 300 000 quelques jours plus tard, avant de chuter à 3 000 cellules par litre aux alentours de la mi-août. Des évolutions qui s’expliquent, en partie, par l’heure à laquelle sont effectués les prélèvements. La présence de l’algue variant énormément en fonction des marées. Les MNS rencontrés précisent toutefois qu’à leur connaissance, « aucun baigneur n’est venu [les] voir pour se plaindre de l’algue ».
S’ils se permettent malgré tout de se montrer aussi catégoriques sur l’origine de leurs symptômes, c’est parce que beaucoup avaient déjà été intoxiqués l’an passé. C’est aussi le cas de certains professeurs de surf. Saisonnière dans une école de surf de la côte basque, Alice* cite en exemple ce moniteur qui « a été très très malade il n’y a pas longtemps ». « Il avait des tâches sur le corps et ça, on est quasi-sûr que c’est les algues. Il avait déjà été touché l’année dernière et cette année ça lui a fait exactement les mêmes symptômes », décrit la jeune femme, qui, comme il y a un an, a également présenté des signes d’intoxications « vers la mi-juillet ».
Recommandations à l’été 2023
Exposés quotidiennement durant plusieurs heures aux embruns, ou carrément dans l’eau une bonne partie de la journée, sauveteurs, profs de surf mais aussi professionnels du littoral en général, seraient-ils plus susceptibles de tomber malades que les visiteurs de passage ? Difficile de le savoir, tant les études scientifiques sur cette micro-algue, et notamment sur ses effets à long terme sur la santé, font défaut.
Initié par la Communauté d’agglomération Pays Basque, un programme de recherche sur Ostreopsis est en cours depuis mars 2022. Ces recherches doivent, selon la CAPB, définir des seuils d’alerte pour aider les élus à fermer, ou non, leurs plages dès… cet été. Elles serviront également à formuler des recommandations à l'échelle de l'Hexagone, qui seront en vigueur dans un an. « Les rapports seront communiqués, il n’y a pas de volonté de faire de l’omerta », promet Emmanuel Alzuri.
*Le prénom a été modifié
Pour rappel:
http://ace-hendaye.over-blog.fr/2022/06/communique-de-presse-du-cade-sur-l-ostreopsis.html