Des universitaires spécialisés dans le journalisme ont mis en garde contre le partenariat entre Google et News Corp pour financer la Digital News Academy de l’université de Melbourne. En France, Facebook verse des millions d’euros à plusieurs grands médias, ce qui pose la question de la dépendance de certaines rédactions françaises. La dépendance croissante du secteur des médias à l’égard des géants du numérique a pour effet de remettre le destin et l’orientation du journalisme aux mains des GAFAM.
News Corp Australia et Google ont annoncé la création du Académie de l’actualité numérique (Digital News Academy) en partenariat avec la Melbourne Business School de l’Université de Melbourne. Il offrira une formation aux compétences numériques aux journalistes de News Corp et à d’autres médias.
News Corp Australia s’est donc associé à, son ancien ennemi, Google Australie, pour créer cette académie afin d’envoyer des centaines de journalistes dans une école de commerce universitaire.
Le président exécutif de News Corp Australia, Michael Miller, a déclaré que l’académie construirait une Australie plus forte “en informant la société par le biais de reportages et d’actions de sensibilisation solides et courageux »
“L’académie jouera un rôle dans l’équipement des organisations de médias d’information et des professionnels de l’information – des reporters sur le terrain aux rédacteurs et éditeurs – avec la boîte à outils, les compétences et l’état d’esprit nécessaires pour saisir les opportunités offertes par les médias numériques”, a aussi déclaré M. Miller.
Des universitaires ont averti que ce partenariat permettrait à Google de façonner les programmes d’enseignement du journalisme.
Dans un article publié sur The Conversation, trois universitaires spécialisés dans le journalisme ont mis en garde contre le financement d’une académie de journalisme par un géant des médias controversé et par un géant technologique encore plus controversé.
Les universitaires sont inquiets est que l’académie augmentera l’influence de Google dans l’industrie des médias
« Compter sur Google pour combler le manque à gagner des budgets de formation des organismes de presse est un problème. Cela permet à Google de façonner les programmes d’études tout en donnant l’impression d’être le champion de l’industrie du journalisme qu’il a été accusé de saper », écrivent-ils.
Il y a 12 mois, Google a signé un accord pluriannuel avec News Corp qui a conduit le moteur de recherche à payer le journalisme des sites d’information du monde entier. D’autres organisations médiatiques, dont Guardian Australia, ont également signé des accords avec Google l’année dernière.
Facebook, lui, fournira de l’argent pour un « fonds d’innovation » pour 170 journaux régionaux australiens.
En France, Facebook a misé sur BFMTV, Le Monde et Brut
En juin 2019, lors du GEN Summit , qui réunissait des dirigeants de médias, journalistes et représentants des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon & Microsoft), Jesper Doub, responsable, pour Facebook, des partenariats avec les médias en Europe, Afrique et Moyen-Orient, disait « Il est essentiel que nous construisions des ponts » entre les rédactions et les plateformes comme Facebook.
En septembre 2019, Facebook annonçait de nouveaux partenariats en France et en Europe autour de la création de contenus vidéo exclusifs pour Facebook Watch, l’espace dédié à la vidéo sur Facebook, permettant aux utilisateurs de découvrir des contenus, de s’informer et de se divertir.
Le réseau social a signé un partenariat avec trois médias tricolores (BFM, Le Monde et Brut), qui se sont engagés à produire des contenus exclusifs pour sa plateforme vidéo.
Le quotidien du soir proposerait une série hebdomadaire, « Plan B », consacrée aux reportages sur les enjeux environnementaux. Brut animerait une émission d’actualité du lundi au vendredi. Quant à la chaîne BFMTV, elle dépêcherait chaque soir son animateur vedette Bruce Toussaint pour décrypter l’actualité de la journée et animer une séquence anti-fake news.
Tout ceci tente à expliquer pourquoi Veran commente des mesures sanitaires sur Brut ou que BFMTV soit fortement sous influence et porte-parole de l’Etat. D’ailleurs, M.O Fogiel (patron de bfm) est un très proche de l’actuel président.
A l’instar de la dépendance aux « actionnaires milliardaires » ou de la proximité avec le pouvoir politique, les médias « main Stream » français sont aussi devenus dépendants au GAFAM. L’écosystème de publication du réseau social est devenu un outil vital pour ce secteur.
Asphyxiés financièrement et désertés par les lecteurs, les médias traditionnels français ont en effet trouvé dans l’audience apportée par les GAFAM un ballon d’oxygène inespéré.
Et cette servitude volontaire a forcément un impact sur l’impartialité de ces rédactions et donc sur la sincérité des informations qu’elles diffusent.
L’indépendance de la presse mise à mal par les GAFAM
Les grandes entreprises numériques apportent quantité de lecteurs et de subventions à la presse et c’e sont les “Big Tech” qui fixent les règles.
La dépendance croissante du secteur des médias à l’égard des recettes tirées de la publicité numérique a eu pour effet de remettre le destin et l’orientation du journalisme aux mains des principales entreprises qui dominent ce marché comme Google et Facebook.
En 2019, une analyse des données relatives au taux de trafic sur les sites web de six des plus grands éditeurs de presse britanniques a révélé que plus d’un tiers de leurs visites provenaient de Google et Facebook.
Une étude de la News Media Alliance a révélé que Google a tiré 4,7 milliards de dollars de la diffusion de contenus d’actualité en 2018, ce qui, bien que ne représentant que 4 % de ses revenus globaux de cette année, équivaut à 33 % du total des recettes publicitaires apportées par l’ensemble de l’industrie de la presse. L’étude mentionne également qu’entre 16 et 40 % des résultats de recherche de Google sont des articles de presse.
Google a influencé le journalisme plus que n’importe quel autre géant technologique au fil des ans, avec diverses initiatives, de l’AMP au “reportage original”.
Les GAFAM utilisent des critères vagues et sélectifs pour considérer la désinformation des uns comme un fait et les faits des autres comme de la désinformation, afin de conserver le monopole de l’information publique.
Après la crise des Gilets jaunes, celle du Covid-19 a, à son tour, mis en lumière une profonde crise de défiance des citoyens envers les médias dits “mainstreams”, qui, sous le contrôle « indirect » des GAFAM, appliquent une censure de plus en plus agressive envers les voix dissidentes.
Des millions de citoyens sont en attente d’une presse libre, indépendante, courageuse, intègre et sûrement pas d’une presse soumise à de nouveaux maîtres.