Créée dans les années 70, la Commission nationale informatique et libertés (Cnil) est censée protéger les citoyen·nes contre les abus de surveillance, fichage et recueil de données, rendus possible par les nouveaux moyens technologiques. Dans les faits, cette instance est la meilleure alliée du pouvoir et du développement techno-totalitaire.
Peut-on espérer quelque chose de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) ? Pour La Quadrature du net, la messe est dite : «On a fait une croix sur la Cnil», assène Bastien Le Querrec, juriste bénévole au sein de l’association. Et il n’est pas le seul.
À l’origine, cette commission a été créée pour défendre les citoyen·nes des abus de fichage et de surveillance rendus possibles par les nouvelles technologies. C’était en 1978. Le gouvernement prévoyait alors d’associer chaque petit gars et chaque petite nana du pays à un numéro, à travers le fichier Safari (Système automatisé pour les fichiers administratifs et le répertoire des individus), qui devait recouper les informations recueillies par diverses administrations. Le tollé alors déclenché par cette annonce pousse le Premier ministre à créer la Cnil qui doit, censément, veiller à ce que le développement de l’informatique se réalise dans le respect de la vie privée, des libertés individuelles et publiques. Mais alors, qu’est-ce qui coince ?
Au lieu de lutter contre la prolifération des moyens de surveillance et la collecte de données, la Cnil accompagne plutôt le mouvement – et le légitime, donc. Dès 2007, certains groupes (Oblomoff, Pièces et main d’œuvre…) réclament sa dissolution : «Main dans la main avec les gouvernements et les industriels, [la Cnil] a concrètement travaillé à ce que l’inacceptable semble acceptable (…). Sa mission a consisté à endormir toute critique et toute révolte, en jugeant à notre place et en notre nom de ce qui pouvait porter le nom de liberté».
«Plus qu’une lapalissade»
Le groupe Marcuse note, en 2013, que «la protection que nous offre la Cnil contre les conséquences de la croissance indéfinie des fichiers et des traceurs électroniques nécessite l’existence de ces fichiers. Il y a là plus qu’une lapalissade : toute l’activité et le discours de cette institution présupposent comme un fait indiscutable l’existence et le fonctionnement des fichiers informatiques déjà existants, mais aussi leur multiplication à venir». (1)
Et les choses se sont encore détériorées. Depuis 2018, le président de la Cnil est nommé par le président de la République. Le choix de Macron s’est porté sur Marie-Laure Denis, une vraie militante de la liberté issue du bas peuple : diplômée de l’Éna, ex-directrice de cabinet du maire de Paris Jean Tibéri, son père a été secrétaire général adjoint à l’Élysée sous Pompidou, tout comme son mari qui l’a été sous Chirac. Résultat : la Cnil en est arrivée à conseiller le gouvernement sur les meilleures façons de passer outre les règles qu’elle est censée défendre.
Ça a été le cas avec la loi dite de «Sécurité globale» et ses drones de surveillance. Leur utilisation est incompatible avec le droit européen et a été jugée illégale par le Conseil d’État ? La Cnil préconise au gouvernement de les utiliser à titre expérimental afin de contourner ces règles. Ça vaut le coup d’avoir un expert.
NB
1- Extrait de l’ouvrage La liberté dans le coma, éd. La lenteur.
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Source: https://refuser-compteur-linky.fr/faut-il-liquider-la-cnil/