François MUSSEAU De notre correspondant à Madrid 13 août 2012 à 20:36
La dette des communautés autonomes et des caisses d’épargne plombe l’Espagne.
L’aéroport fantôme de Ciudad Real n’est qu’un exemple. De nombreux autres projets mégalos ont coûté cher aux contribuables espagnols. Citons, pêle-mêle, La Ciudad de la Luz (une cité du cinéma) à Alicante, le parc thématique Terra Mitica de Benidorm, le complexe sportif Caja Mágica à Madrid, le centre culturel Oscar-Niemeyer à Avilés, la station d’AVE (le TGV espagnol) à Cuenca ou encore les aéroports de Huesca, de León ou de Castellon, ce dernier n’ayant jamais vu un seul avion… S’ils ont connu quelque affluence, d’autres n’ont jamais été rentables, comme la Cité des arts et des sciences, à Valence, qui a coûté la bagatelle de 1,2 milliard d’euros.
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Les 17 régions espagnoles subissent aujourd’hui un retour de manivelle brutal. Quand les taux d’intérêt étaient dérisoires, elles ont dépensé sans compter, sans que le pouvoir central ne leur impose une quelconque limite. Le Premier ministre socialiste José Luis Zapatero, entre 2004 et 2011, fut particulièrement laxiste. Il a fallu attendre qu’il passe le relais au conservateur Mariano Rajoy, en novembre, pour que l’UE mesure l’ampleur du désastre : du fait de l’indiscipline budgétaire des régions, le déficit public du pays n’était pas de 6%, comme annoncé, mais de 8,9% ! «Cela a été un coup de massue terrible sur la confiance de l’étranger vis-à-vis de l’Espagne, dit José A. Herce, d’Analystes financiers internationaux (AFI). On découvrait que les régions étaient bien plus endettées qu’imaginé.»
Aujourd’hui soumises à une austérité de fer pour ramener leur déficit public à 1,5% d’ici à la fin de l’année, les communautés autonomes sont prises à la gorge, obligées de tailler drastiquement dans leurs budgets santé et enseignement. Ruinés, astreints à rembourser leurs créances à des taux prohibitifs, les gouvernements régionaux sont à cours de liquidités. Dans la riche Catalogne, les hôpitaux semi-privés et les pharmaciens ne reçoivent plus l’argent public qui leur est dû. Pour survivre, cette région et quelques autres ont officiellement sollicité l’aide du pouvoir central, à travers le Fonds de liquidités régional. «Techniquement, toutes les régions espagnoles sont en dépôt de bilan», éditorialise le quotidien économique Cinco Días.
Un tel scandale n’aurait pas été possible sans les caisses d’épargne. Celles-ci étant contrôlées par les exécutifs régionaux, l’argent public était massivement versé dans des projets immobiliers douteux et hautement risqués. Résultat, ces caisses d’épargne concentrent l’essentiel des actifs toxiques (184 milliards d’euros) liés à la construction, secteur qui s’est effondré en 2008. Depuis, une dizaine d’établissements ont été nationalisés et renfloués par Madrid. «Ce qui est dramatique ici, c’est de voir comment l’énormité de la dette bancaire s’est répercutée sur la dette publique», résume l’analyste Xavier Vidal-Folch. Le pire exemple est celui de Bankia (31 milliards d’euros d’actifs douteux), fusion des deux plus grandes caisses d’épargne, Caja Madrid et Bancaja. En faillite déclarée en avril, la banque a été nationalisée et renflouée par le gouvernement espagnol, à hauteur de 4,4 milliards d’euros ; 19 milliards de mieux lui ont été promis par le fonds européen qui, au total, s’est engagé à recapitaliser les banques espagnoles à concurrence de 100 milliards d’euros.
François MUSSEAU De notre correspondant à Madrid
Source : http://www.liberation.fr/economie/2012/08/13/regions-gabegie-la-magnifique_839597