Lundi 6 octobre 2014
Le miel, c’est bon pour la santé. À condition que les abeilles aient entièrement fait le boulot. Ce qui est loin d’être toujours le cas. D’après les derniers chiffres de la Répression des Fraudes, 18 % des pots de miel contiennent du sucre industriel. Et pas qu’un peu : dans certains pots, la moitié du nectar d’abeilles est en fait du sirop de sucre bon marché !
Nous avions déjà alerté au sujet de cette manipulation qui peut vous transformer, ni vu ni connu, un bon vieux pot de miel en un sirop industriel arôme miel. Il est vrai que le sucre raffiné liquide coûte quatre fois moins cher que le miel. C’est pour cette raison que les industriels du secteur, fines guêpes, ont convaincu, il y a dix ans, Bruxelles de les autoriser, sans en avertir le consommateur, à rajouter jusqu’à 5 % de « sucre exogène ». Le plus goûteux, c’est que la plupart des margoulins qui forcent la dose ont trouvé l’astuce pour échapper aux contrôles.
En effet, les Fraudes se contentent d’une méthode d’analyse qui ne détecte dans le miel que les ajouts de sucre de canne ou de maïs, alors que les tricheurs se sont rabattus depuis belle lurette sur d’autres types de sucre, en l’occurrence des sirops de sucre à base d’amidon de céréales, qui à l’analyse se confondent avec le fructose fabriqué par les abeilles. « Que Choisir » a eu la bonne idée d’acheter vingt pots de miel bon marché en grande surface et de les analyser avec une nouvelle méthode – non encore homologuée – qui repère tous les types de sucres.
Par résonance magnétique nucléaire, on obtient ainsi la carte d’identité moléculaire du miel. Résultat : c’est 30 % des miels qui sont hors clous, quasi le double des statistiques officielles. Les quatre pots les plus chargés sont vendus sous les marques des distributeurs Auchan, Cora, Leclerc et Leader Price. Tous affichent sur l’étiquette « mélanges de miels, originaire de la CE et non originaires de la CE ». Une mention qui sert souvent à fourguer du miel chinois low cost additionné en bout de course avec un peu de miel européen.
En France, près des deux tiers des 40 000 tonnes de miel avalées chaque année proviennent de la Chine ou du Vietnam. D’abord parce que le produit ne coûte pas cher, mais surtout parce que notre propre production a fondu de moitié en dix ans. À cause, bien sûr, des insecticides mais aussi du frelon asiatique. De quoi nous fiche le bourdon…
Source : Le Canard Enchaîné N° 4901 du 1er octobre 2014