Sujet à la une
31/01/2012 Carole SUHAS
Pasaia est bien loin pour les élus des villes de la côte du Pays Basque Nord. En témoigne l’harmonie de leur silence aujourd’hui, trois jours après la clôture de la seconde enquête publique. Commandée par l’autorité portuaire de Pasaia, cette seconde enquête publique survient après une première reçue défavorablement par le ministère de l’environnement espagnol, en avril 2011. Ce dernier mettait alors en avant la modification “significative et irréversible” du site, d’un point de vue écologique, ainsi que la viabilité économique du projet. Il alertait également que la libération du port intérieur, ferait perdre son utilité à l’espace libéré qui ne pourrait de toute façon pas être urbanisé. D’où une opinion publique qui plébiscite, elle, la réhabilitation du port intérieur plutôt que le gigantesque projet en extérieur, qui nécessiterait l’amputation d’une partie du Jaizkibel.
“Copié/collé”
Fort de ces constats, une deuxième enquête publique était alors engagée, de façon à présenter de nouvelles alternatives. Enquête qui devait alors être relayée sur le territoire français, comme le veut tout projet dit “transfrontalier”. C’est ainsi que l’ACE et le CADE, associations protectrices de l’environnement, se sont chargées de faire passer le dossier à 7 communes côtières, Hendaye, Urrugne, Ciboure, Saint-Jean de Luz, Bidart, Guéthary, Biarritz et Anglet afin de permettre aux maires concernés d’exprimer leurs allégations sur le projet. Ce que ces derniers ne se sont pas empressés de faire.
ACE, Action Citoyenne Environnementale, à Hendaye reproche, sans pour autant s’en étonner, non seulement le silence des élus, mais aussi et surtout l’enquête qu’elle qualifie de “copié/collé” de la première. Voire, les trois nouvelles propositions de transformation du port seraient délibérément “bidons”, minimalistes ou bien pharaoniques, afin “que le projet de super-port extérieur paraisse le plus pertinent” estime la co-présidente d’ACE, Maryvonne Gervaise. Pour l’association hendayaise, si aujourd’hui, l’enquête semble avoir été très peu modifiée, c’est que l’autorité portuaire de Pasaia tente une nouvelle fois sa chance avec le nouveau gouvernement de Mariano Rajoy, “ce qui nous laisse dans l’expectative”. A ce changement de majorité, et donc peut-être de politique en ce qui concerne Pasaia, s’ajoute l’argument économique, à l’instar de l’ensemble des gros projets d’infrastructures. Aujourd’hui, le contexte de crise peut laisser douter de l’arrivée des financements pour un tel projet, ou du moins de sa pertinence.
Retard généralisé
Alors que les maires de Hendaye et Guéthary s’étaient déjà déclarés opposés à ce projet, et favorables à la création d’un corridor écologique marin qui protégerait la faune et la flore marine entre Donostia et Biarritz, ils n’ont toutefois pas communiqué leurs allégations à l’autorité portuaire.
Contacté hier, Battitt Sallaberry, maire de Hendaye, déclarait qu’il “n’avait pas eu beaucoup de temps jusque-là”, mais qu’il “comptait répondre à l’enquête publique”. Peyuco Duhart, maire de Saint-Jean de Luz jugeait lui plus judicieuse la réunion des maires de la côte, afin qu’une décision collective soit prise. “J’estime que la question doit être traitée à un niveau plus large que simplement municipal, au niveau intercommunal ou même de l’Eurocité. La position doit être commune, cela dit c’est aussi un projet qui devrait créer des emplois”. Contactés également, les maires des communes d’Urrugne, Bidart, Ciboure, Biarritz, Anglet et Guéthary n’ont pas donné suite aux appels. Il semblerait également qu’une décision collective ne soit pas à l’ordre du jour, bien que les maires de la côte aient un représentant en la personne d’Albert Larrousset, maire de Guéthary.
Le conseil général lui aussi sollicité, n’aurait pas non plus donné signe de vie, mais lors de la première enquête publique il avait émis ses “réserves voire les oppositions qui conviennent quant à l’impact du projet sur notre environnement”. Il avait par ailleurs regretté de n’avoir pu participer aux enquêtes et études sur le projet, puisque “directement concerné, tant dans la baie de Txingudi que sur la corniche basque”. Face à ce “simulacre” d’enquête publique, les associations ACE et CADE demandent une troisième enquête, qui reprendrait de réelles propositions et qui aurait une réelle résonance sur le sol (et l’océan) outre Bidassoa.
Par ailleurs, une mobilisation sociale pour “la paralysie des grands projets d’infrastructures en Gipuzkoa” a été engagée pendant tout le mois de janvier en Pays Basque Sud, et se terminera par une grande manifestation samedi 4 février prochain à Donostia à 17 h 30. Il faudra toutefois s’armer de patience, les résultats de l’enquête publique devraient être communiqués au ministère de l’environnement espagnol qui ne validera ou n’invalidera pas le projet avant le mois de septembre prochain.