Le développement du ferroutage n’est pas encore assuré. (PHOTO FRANCK VALENTIN)
ARNAUD BOUCOMONT
04/11/2013, 08 h 43 | Mis à jour le 04/11/2013, 13 h 49
Le Languedoc-Roussillon s’apprête-t-il à payer les pots cassés de la suspension de l’écotaxe ? L’hypothèse n’est en tout cas pas inepte. C’est, façon ricochet, ce qui pourrait pendre au nez de la région, après la mobilisation bretonne.
L’écotaxe, rappelons-le, devait servir à financer les projets de ligne à grande vitesse (LGV). Et si l’on pensait le dossier Montpellier-Perpignan enterré, il avait repris des couleurs ces derniers jours.
Ecotaxe : une manne qui s'envole ?
Certes, l’État avait reporté le chantier de la LGV à après 2030, faute de financements. Mais l’Europe a annoncé un coup de pouce : 26 milliards d’euros dédiés, entre 2014 et 2020, au réseau de transport européen. Le gouvernement a aussitôt réinscrit le tronçon Bordeaux-Espagne, le long de l’Atlantique, au calendrier des lignes TGV prioritaires. Reste aux élus languedociens à être aussi persuasifs, en obtenant que le tracé Montpellier-Perpignan soit réintégré au programme (lire ci-dessous).
À cette nuance près, donc, et de taille : l’État français aura bien du mal à suivre, sur le tapis de jeu européen, s’il se défait de la manne “écotaxe”. Pire, s’il doit indemniser la société Ecomouv’- chargée de collecter cet impôt, via un partenariat public-privé -, à hauteur de 15 à 20 M€ par mois tant que son application n’est pas effective.
Mais Éric Boisseau, représentant régional de la Fnaut (Fédération nationale des associations des usagers des transports), aurait tendance à doucher les espoirs de ceux qui pensent que la rallonge de l’Europe peut sauver le projet LGV Montpellier-Perpignan...
"Il ne s’agit pas du tout d’argent fléché sur des LGV mais sur neuf corridors ferroviaires européens transfrontaliers, assure Éric Boisseau. Pour Bruxelles, cela ne signifie pas acceptation des nouvelles LGV mais mise aux normes européennes, pour le fret d’abord, pour le voyageur de proximité ensuite, avec a minima l’équipement en signalisation ERTMS (limitation automatique de la vitesse, NDLR), etc., et a maxima une ligne nouvelle si nécessaire."
Eviter les investissements pharaoniques
Mise aux normes plutôt qu’investissements pharaoniques, tel était d’ailleurs le leitmotiv, en juin, du Premier ministre Jean-Marc Ayrault. Il avait assorti d’une précision l’annonce que certaines lignes LGV avaient du plomb dans l’aile : il fallait regarder "l’état réel des infrastructures existantes" et penser à l’améliorer quand c’était justifié, avant d’en construire de nouvelles.
La ligne LGV Montpellier-Perpignan, décidément, n’a pas l’air pour demain. À moins d’un compromis, répété à l’envi par l’associatif Éric Boisseau : obtenir une ligne mixte voyageurs-fret, limitée à 220 km/h, dépouillée "des exigences excessives des collectivités qui ont rendu le projet irréalisable financièrement".
Un lobbying pour l’instant silencieux
La récente éclaircie européenne sous le ciel des projets LGV a-t-elle poussé les élus de la région à une union sacrée pour arracher une réinscription de la ligne Montpellier-Perpignan dans les petits papiers de l’État ? "S’il faut remobiliser les collectivités, on le fera", précise-t-on dans l’entourage de Christian Bourquin, le président de Région. Mais rien n’est prévu pour l’instant. "Il faut vite que nous montions tous à Paris, quels que soient les bords politiques", avait incité le député européen UMP Franck Proust (Midi Libre du 26 octobre). "J’écris immédiatement au président du conseil régional", précisait-il.
"Nous n’avons toujours pas reçu son courrier", rétorque la Région, qui rappelle qu’une telle rencontre avait été organisée au printemps entre le ministre des Transports, Frédéric Cuvillier, et six grands élus UMP et PS de la région. C’est la voie du lobbying silencieux qui est choisie cet automne : "Quand on bosse, on ne le dit pas, résume-t-on au cabinet de Bourquin. Jean-Claude Gayssot (vice-président
de la Région, en charge des affaires européennes, NDLR) a rencontré le Premier ministre. On n’a pas obtenu que ce soit réinscrit, pas encore, mais les pourparlers avec le gouvernement et l’Europe sont permanents."
Le président du groupe UMP à la Région, Stéphan Rossignol, incite Christian Bourquin à "s’engager totalement dans ce dossier". Alors qu’il avait, selon lui, "activement contribué à l’échec de la candidature de la ligne lors de la programmation initiale, il a une occasion de se racheter".