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17 juillet 2014 4 17 /07 /juillet /2014 07:30

 

 

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Le rocher baptisé Kapelu, à la pointe Sainte-Anne, est attaqué par l’eau de mer, qui a creusé une grotte, et par l’eau de pluie, qui dessine une cuvette et s’infiltre dans les failles. © Photo O. D.

 

Publié le 24/03/2014 à 06h00 par olivier darrioumerle


La corniche basque s’érode, laissant des îlots rocheux se séparer de la falaise

Les Deux-Jumeaux auront bientôt un petit frère dans leur alignement. Que les vendeurs de cartes postales ne s'inquiètent pas, ils auront le temps d'écouler leur stock. La séparation du triplé n'est pas prévue avant quelques siècles, « ou quelques millénaires », explique Thierry Mulder, professeur de géologie à l'université de Bordeaux. Les observateurs les plus impatients ont toutefois une petite chance d'assister à l'accouchement plus tôt que prévu.


La plaque ibérique continue de pousser et un séisme local pourrait accélérer l'éboulement des falaises. Au risque de voir un triplé mort-né. « Deux failles très nettes traversent la roche dans des directions opposées. Une secousse sismique pourrait bien le mettre par terre », précise Ganix Grabières, conservateur du littoral.


Par en bas et en haut

Dans le meilleur des cas, le cordon rocheux qui le relie encore à la falaise devrait se couper lentement par le jeu de l'érosion. « Et il tiendra debout peut-être un certain temps », prédit Ganix Grabières. Ce cordon rocheux, au bout de la pointe Sainte-Anne, les Hendayais l'ont surnommé le Sphinx - à cause de l'air de ressemblance - avant de le baptiser Kapelu.


Exposé au vent de nord-ouest, il est sans cesse martelé par la houle, qui, au fil du temps, a creusé une grotte dans son ventre. L'eau de mer s'y engouffre pour ressortir par un trou de l'autre côté. Et lors des tempêtes du mois de février, les vagues sont entrées à très forte pression. « Elles l'ont indéniablement fragilisé », souligne le conservateur du littoral. Kapelu, le rocher le plus vulnérable de la pointe Sainte-Anne, est donc attaqué à sa base par la mer. Mais aussi à son sommet par la pluie, qui dessine un creux s'approfondissant largement.


Il faut savoir qu'en général l'érosion sur la corniche basque est moins le fait des attaques de la mer, comme on l'apprend dans les manuels scolaires, que de l'action des pluies, naturellement acides. Le calcaire n'y résiste pas. Une fois dissous, il ne reste que la composante argileuse des marnes, souple et glissante, qui fait un effet de toboggan aux blocs de roches. Les strates glissent les unes sur les autres, comme une pile d'assiettes sur une pente. Entassés au pied des falaises, les éboulements argileux sont ensuite évacués par la mer.


De la même trempe

Les Deux-Jumeaux, mieux armés en calcaire, ont résisté à l'érosion jusqu'à aujourd'hui. Le troisième est de la même trempe. Ses strates sédimentaires sont grossièrement horizontales. Elles ne glisseront pas. En revanche, l'eau de pluie s'infiltre dans de larges failles. « Ces fractures fragilisent la masse rocheuse et orientent l'érosion », note Thierry Mulder. Comprenez, l'eau préfère s'infiltrer dans les endroits les plus tendres, en l'occurrence, les failles dans la roche.


Pour le géologue, le triplé verra le jour. C'est une certitude. Tiendra-t-il debout ? « Les falaises vont continuer à reculer, prévoit-il. Les criques vont s'approfondir. Des îlots rocheux vont naître, comme c'est le cas du triplé. » Mais, ce ne sera qu'un parmi d'autres. Les Deux-Jumeaux vont s'éroder. Et disparaître. Ils seront peut-être même engloutis avant que leur petit frère se sépare de la falaise. Et personne ne sera en vie pour voir l'accouchement.

 


 

Source : http://www.sudouest.fr/2014/03/24/le-frere-des-jumeaux-1501998-4018.php

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