5 pesticides sont reconnus cancérigènes, dont le glyphosate utilisé dans le Roundup de Monsanto
23 mars 2015, 10 h 09 C. Magdelaine / notre-planete.info
Le Centre International de recherche sur le Cancer (CIRC) vient de classer comme cancérigène probable 5 pesticides dont le glyphosate, la substance active du célèbre herbicide RoundUp, le désherbant le plus utilisé au monde, associé à la culture des OGM. Une déclaration officielle qui était attendue mais rejetée par le fabriquant, Monsanto.
Au total ce sont 5 pesticides dont l'évaluation scientifique les classe comme étant des cancérigènes probables : glyphosate, malathion, diazinon dans le groupe 2A (l'agent est probablement cancérogène pour l'Homme) ; tetrachlorvinphos et parathion dans le groupe 2B (l'agent est peut-être cancérogène pour l'Homme).
Selon les évaluations du CIRC, organe de l'Organisation Mondiale de la Santé, les pesticides tetrachlorvinphos et parathion (interdits en Europe) favorisent le développement de cancers chez les animaux étudiés en laboratoire.
Pour l'insecticide malathion, il existe des preuves limitées de son implication dans le lymphome de Hodgkin, et le cancer de la prostate, principalement chez les agriculteurs, les premiers exposés aux substances qu'ils utilisent. Ce pesticide est encore utilisé massivement à travers le monde, en agriculture mais aussi dans les parcs publics, dans les services sanitaires et chez les particuliers.
Pour l'insecticide diazinon, il serait impliqué dans l'apparition du cancer des poumons et du lymphome de Hodgkin. Sa classification dans le groupe 2A est basée sur des « évidences fortes » que le diazinon entraîne des lésions chromosomiques. Ce pesticide est utilisé en agriculture et chez les particuliers avec des volumes en diminution suite à des restrictions sur son usage en Europe et aux USA.
En ce qui concerne l'herbicide glyphosate, classé dans le groupe 2A (dernier niveau avant le groupe 1), il existe des preuves limitées de son implication dans le lymphome de Hodgkin, principalement chez les agriculteurs. De plus, les animaux de laboratoire et notamment les souris, peuvent développer des cancers en l'ingérant. Enfin, le glyphosate peut causer des dégâts sur l'ADN, les cellules humaines et des lésions chromosomiques.
Cet herbicide est sans doute le plus symptomatique des dérives de l'industrie agro-alimentaire et de la prétendue bienfaisance des cultures transgéniques. En effet, c'est actuellement l'herbicide le plus vendu au monde, en pleine croissance depuis qu'il est rendu indispensable car couplé avec des OGM qui lui sont résistants. En outre, il est utilisé en sylviculture mais aussi en milieu urbain et chez les particuliers.
Résultat : on retrouve du glyphosate partout (bien que les quantités soient faibles) : dans l'air, dans l'eau et bien sûr dans les aliments.
Cette nouvelle n'est pas vraiment une surprise, notamment pour le glyphosate au cœur de vives polémiques suite à l'étude controversée de Séralini sur les effets toxiques graves d'un maïs OGM et de l'herbicide Roundup fabriqué par Monsanto. Mais elle était attendue pour que le glyphosate soit enfin retiré de la vente en Europe : « si le Règlement 1107/2009 (cf. Annexe II point 3.6.3) s'applique il devrait y avoir des retraits du marché de produits commerciaux contenant cette substances active désormais reconnue officiellement comme cancérigène probable » indique l'association Générations Futures.
Monsanto rejette formellement les évaluations du CIRC
Monsanto, dans un communiqué, conteste cette évaluation officielle et scientifique : "Toutes les utilisations de glyphosate sont sans danger pour la santé humaine". Pour étayer son argumentaire, Monsanto indique s'appuyer sur "la plus importante base de données sur la santé humaine, à travers le monde, jamais compilées sur un produit agricole." Monsanto accuse même le CIRC d'avoir "délibérément ignoré des dizaines d'études scientifiques" qui, bien évidemment, concluent que le glyphosate "n'est pas un risque pour la santé humaine".
De surcroît, l'évaluation du CIRC se serait focalisée sur d'anciennes études. Au final, Monsanto martèle qu'il n'existe pas de "liens entre le glyphosate et une augmentation du cancer". On ne pouvait évidemment pas attendre d'autre argumentaire de la part du fabricant : l'interdiction du Roundup dans le monde serait un coup dur porté aux cultures transgéniques censées éviter l'utilisation de pesticides (sic).
"Non, la plupart des cancers ne sont pas dus à la “malchance”"
Dans une analyse récente, le CIRC a rappelé que "les cinquante dernières années de recherche épidémiologique internationale ont montré que la plupart des cancers qui sont fréquents dans une population sont relativement rares dans une autre et que ces tendances varient dans le temps. Par exemple, le cancer de l'œsophage est fréquent chez les hommes en Afrique de l'Est, mais rare en Afrique de l'Ouest. Le cancer colorectal, qui était rare autrefois au Japon, a vu son incidence quadrupler en seulement vingt ans. Ces observations sont caractéristiques de nombreux cancers fréquents et viennent renforcer l'idée selon laquelle les expositions environnementales et liées au mode de vie ont un rôle majeur dans l'apparition des cancers, par opposition à la variation génétique ou au hasard (la “malchance”)".
Le Dr Christopher Wild, Directeur du CIRC a déclaré à ce propos : "conclure que la malchance est la principale cause des cancers serait trompeur et peut gravement obérer les efforts entrepris pour identifier les causes de la maladie et la prévenir efficacement".
Cette mise au point nous semblait importante pour évacuer les sempiternels arguments des fatalistes en matière de cancer.
Rappelons enfin que dans le doute, le principe de précaution devrait s'appliquer, la santé des Hommes et des milieux étant prioritaire sur la recherche de profits.
Référence
Carcinogenicity of tetrachlorvinphos, parathion, malathion, diazinon, and glyphosate ; Kathryn Z Guyton, Dana Loomis, Yann Grosse, Fatiha El Ghissassi, Lamia Benbrahim-Tallaa, Neela Guha, Chiara Scoccianti, Heidi Mattock, Kurt Straif - International Agency for Research on Cancer Monograph Working Group, IARC, Lyon, France. Publié en ligne le 20 mars 2015.
Auteur : Christophe Magdelaine /
Source : http://www.notre-planete.info/actualites/4238-pesticides-cancer-CIRC