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7 octobre 2015 3 07 /10 /octobre /2015 12:12

 

Alain Bonnafous / Professeur émérite de l'Université de Lyon | Le 06/10 à 11:43

  LGV : comptes et mécomptes de la future ligne sud

LGV : comptes et mécomptes de la future ligne sud

Le gouvernement a validé les projets de lignes à grande vitesse Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax contre l'avis de la commission d'enquête publique. Elles seront reliées à la LGV Bordeaux-Tours, qui avait été en partie financée par des collectivités du Sud-Ouest... en espérant la voir prolongée.

 

Le 30 mars dernier, la commission d'enquête publique sur les projets de lignes à grande vitesse Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax, vers l'Espagne, a rendu un avis défavorable. Le 26 septembre, le gouvernement a pourtant validé ces projets comme l'on pouvait s'y attendre.

 

Cette décision peut surprendre, car, outre l’avis de la commission d’enquête, le rapport de la Cour des comptes de l’automne dernier n’était guère favorable à ce projet : il mettait en doute les prévisions de trafic comme l’utilité d’une offre TGV qui placerait Toulouse à 3h11 de Paris dans le meilleur des cas. On peut discuter ces appréciations, d’autant que la contrexpertise proposée par le Commissariat général à l’Investissement (CGI) a confirmé la rentabilité positive calculée par RFF du segment Bordeaux-Toulouse, alors que l’autre branche du Grand projet Sud-Ouest (GPSO), Bordeaux-Dax n’est pas rentable.

 

Ces considérations de rentabilité ne sont pas avancées pour justifier la décision gouvernementale. On évoque simplement « des arguments en matière d'aménagement du territoire pour tout l'Arc atlantique, qui est en retard sur le développement de la grande vitesse par rapport à l'Arc méditerranéen ». Mais chacun sait que la vraie raison de cette décision tient aux problèmes de financement du TGV Tours-Bordeaux.

 

Des collectivités mécontentes

La convention de financement de cette liaison actuellement en construction prévoyait l’implication de 5 régions, 19 départements et 34 communautés de communes afin de couvrir 17 % du coût du projet qui est tout de même de 7,8 milliards. Certaines collectivités territoriales ayant refusé de signer, d’autres ne donnant pas suite aux appels de fonds, il manque quelques centaines de millions qui s’ajoutent aux difficultés de paiement de la part de l’État, son Agence de financement des infrastructures de transport de france (AFITF) étant dorénavant privée des ressources de l’écotaxe.

 

L’État s’est engagé à compenser les défauts de paiement des collectivités territoriales. Celles qui trainent les pieds correspondent à deux bonnes raisons de mécontentement : la première concerne l’usage de la ligne nouvelle en construction et les horaires et fréquences des dessertes futures annoncés par SNCF-Mobilité qui sont très éloignés de ce que prévoyait la convention. Il est vrai qu’elle n’avait pas été signée par la SNCF qui a conservé là un argument pour plaider un abaissement des péages.

 

L’autre raison de mécontentement est ailleurs, au sens géographique du terme : plusieurs collectivités hors tracé, à commencer par la région Midi-Pyrénées pour plus de 250 millions d’euros, ont accepté de cofinancer Tours-Bordeaux en considérant que c’était la première étape du GPSO et que les deux prolongements vers Toulouse et vers Dax en direction de l’Espagne seraient réalisés ensuite (l’échéance pour le début des travaux de « 2016 si possible » étant même évoquée dans la convention).

 

Un projet à 8,3 milliards

La commission Mobilité 21 dans son rapport de 2013 « Pour un schéma national de mobilité durable » avait choisi de ménager ces financements en proposant que la liaison Bordeaux-Toulouse soit, après achèvement des grands chantiers en cours, la seule réalisation prévue avant 2030.

 

Pour autant, le ministère n’a pas voulu découpler, pour l’enquête publique, les deux branches du GPSO, l’une, vers Toulouse, étant rentable et l’autre, vers Dax, ne l’étant pas avant longtemps. Il eut été raisonnable d’envisager une programmation au-delà de 2030 de cette branche Sud, en la confrontant à d’autres projets candidats qui pourraient atteindre une rentabilité raisonnable avec une croissance retrouvée et une ouverture à la concurrence des TGV. Au lieu de cela, un projet créateur de valeur est alourdi d’un complément non rentable au point de devenir un projet de 8,3 milliards qui, au total, détruira de la valeur. Une bonne affaire pour les détracteurs du TGV.

 

Par  Alain Bonnafous, professeur émérite de l'Université de Lyon

 

Lire aussi :
LGV Tours-Bordeaux : le chantier à grande vitesse de Vinci  
LGV : le gouvernement valide les projets de lignes Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax

 


Source : http://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-141085-les-comptes-et-mecomptes-du-tgv-gpso-1162712.php

 

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