Bercy annonce à MEDIABASK que la demande de permis de recherche de mines d'or dans le Labourd du projet Sudmine est définitivement rejeté. L'entreprise n'a plus possibilité de faire aucun recours.
Etxeberri, Antton|15/02/2018 07:25|0 commentaires | Mis à jour à: 07:27
La nouvelle est arrivée ce vendredi 9 février 2016, à 11h36, par un appel téléphonique à MEDIABASK du cabinet de Bruno Lemaire : “Le rejet implicite du projet a bien été formé. En effet, Sudmine a bien contesté par un recours gracieux la non-réponse de Bercy à la demande de permis de recherche de mines d’or, mais ce recours gracieux n’a pas été suivi dans un délai légal d’un recours contentieux. Ainsi, ils sont bien en forclos.” Autrement dit, le dossier est clos, la demande de permis de Sudmine n’existe plus.
Recours gracieux ? Recours contentieux ? Forclos ? Les termes utilisés par le chargé de presse du cabinet de Bruno Lemaire méritent une explication de texte. La société Sudmine ayant déposé son permis de recherche le 28 novembre 2014 auprès du ministère de l’Economie, celui-ci avait jusqu’au mois d’avril 2017 pour répondre à cette demande. L’absence de réponse dans ce laps de temps équivaudrait à un refus tacite implicite de la part de Bercy. "Afin de se prémunir du refus tacite", la société Sudmine a déposé un recours gracieux auprès du ministère de l’Economie le 4 mars 2017, afin que l’instruction puisse suivre son cours.
Juridiquement, le recours gracieux est l’un des deux types de recours administratif qui existent dans l’Etat français (l’autre est le recours hiérarchique) qui permet de s’adresser à l’auteur d’une décision pour la contester. Mickaël Laloua, directeur de Sudmine, affirmait à MEDIABASK il y a une semaine que Bercy leur "avait fait savoir qu’ils auraient une réponse d’ici la fin de l’année 2018", tout en avouant n’avoir reçu aucun courrier écrit. Il ajoutait que, "pour le moment", Sudmine n’avait pas déposé de recours contentieux auprès du tribunal administratif, préférant attendre la réponse de Bercy. Le tribunal administratif de Pau a également confirmé à MEDIABASK qu’aucun recours contentieux n’avait été déposé. Sudmine s’est donc contenté de déposer uniquement un recours gracieux. Contrairement au principe général "silence vaut accord", le silence gardé pendant plus de deux mois sur un recours administratif par l’autorité administrative vaut décision de rejet. Autrement dit, Sudmine, qui n’aurait pas reçu de réponse officielle quinze mois après son recours gracieux et qui en espérait toujours une, ignore qu’il a été rejeté.
MEDIABASK s’est entretenu avec le chargé de presse du cabinet de Bruno Lemaire, ministre de l’Economie. S’il nous confirme qu’un recours gracieux a bien été déposé par Sudmine le 4 mars 2017, il nous indique également que ce recours gracieux a été rejeté, et que cette décision a été transmise par recommandé le 20 avril 2017 à la société Sudmine. Une réponse négative a donc bien été envoyée à Sudmine, contrairement à ce que nous dit Mickaël Laloua. Suite à ce courrier reçu, Sudmine avait la possibilité de déposer un nouveau recours, contentieux celui-là, auprès du tribunal administratif dans un délai de deux mois après réception du courrier. Soit au plus tard fin juin 2017. Aucun recours n’ayant été déposé dans cette période, la société se retrouve en position de “forclos” ; c’est à dire que tout recours qu’elle pourrait introduire dorénavant se situerait au-delà du délai légal applicable.
Aucun recours n’étant plus possible pour Sudmine, la demande de permis de recherche de mines d’or est tout simplement ajournée de manière définitive, et la menace de voir une entreprise chercher de l’or dans les terres du Labourd intérieur n’existe plus. C’est donc par cet oubli que Sudmine doit renoncer à sa demande de permis de recherche.
De son côté, le gouvernement français, qui a visiblement joué la montre sur ce dossier, a décidé... de ne jamais rien décider. Une non-réponse qui dans les résultats fait la joie des opposants aux chercheurs d’or. Ce dossier, qui date aujourd’hui de trois ans, a vu deux gouvernements : celui de Hollande, puis celui de Macron. L’un comme l’autre s’est refusé à répondre à la demande de Sudmine.
Ces derniers mois, le ministre de l’Economie, Bruno Lemaire, a été sollicité à différentes reprises. En août 2017, il répondait à Jean-René Etchegaray, président de la Communauté d’agglomération Pays Basque : "J’ai pris note de votre correspondance. (…) Je ne manquerais pas de vous apporter une réponse dans les meilleurs délais". Un mois plus tard, c’est Caroline Phillips, présidente du Conseil de développement du Pays Basque, qui reçoit la réponse du cabinet du ministre : "son agenda l’empêche de répondre favorablement à une demande d’entrevue". A défaut de rencontre, il précise que la Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN), qui a récupéré le dossier, la rencontrera. Elle attend toujours.
Le député et ancien maire de Cambo, Vincent Bru, qui était en contact serré avec Bruno Lemaire concernant ce projet, a, lui, rencontré le sous-directeur de la DGALN. En continuité de sa prédécesseure Sylviane Alaux du temps de la présidence Hollande, le député de la VIe circonscription a pesé de son poids pour que le dossier Sudmine ne se retrouve pas dans les dossiers prioritaires. Vincent Bru nous disait il y a quelques mois : "cette attitude de ne pas répondre dans les délais joue en notre faveur". Aujourd’hui, on comprend mieux ces propos.
Avant de recevoir la nouvelle décisive de Bercy, MEDIABASK était entré en contact avec la DGALN. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que personne ne semblait en mesure de répondre. "Nous avons reçu la consigne de vous indiquer que ce sont les services de la préfecture qui répondront à vos interrogations", nous avait-il été rétorqué. Le préfet des Pyrénées-Atlantiques, Gilbert Payet, nous apprenait, ce mardi, qu’il n’était toujours pas au courant de la nouvelle de Bercy.
Source : https://mediabask.naiz.eus/fr/info_mbsk/20180215/exclusif-le-rejet-du-projet-minier-sudmine-est-acte