3 mars 2018
Madame, Monsieur,
Vous trouverez ci-dessous la tribune publiée par Le Monde de 26 députés (c'est un bien grand mot pour des gens qui se contentent de recopier les âneries d'Enedis) de "La République en marche", puis ma réponse (qui a par contre fort peu de chances d'être à son tour publiée).
Stéphane Lhomme
Conseiller municipal de Saint-Macaire (Gironde)
Animateurs du site web http://refus.linky.gazpar.free.fr
Compteurs Linky : le totalitarisme numérique "en marche"
Vingt-six députés de La République en marche (LREM) ont rédigé une tribune favorable au déploiement par Enedis des compteurs communicants Linky (Le Monde 2 mars 2018). Leurs arguments méritent d'être discutés... et même rectifiés.
En premier lieu, il faut noter que ce texte aligne les affirmations gratuites et les slogans creux, certains étant même scandés deux fois : "Les compteurs Linky sont un outil majeur au service de la transition énergétique", "Ils permettent de piloter plus efficacement le réseau", "Ils permettent aux consommateurs de mieux maîtriser leur consommation électrique" ou (encore !) "C’est une composante majeure de la transition énergétique"…
Par ailleurs, les signataires avancent une étude qui assure que le Linky "pourrait permettre jusqu’à 23 % d’économies d’énergie" : on n'est pas loin du régime qui permet de "perdre 25kg en 5 jours en mangeant à volonté".
Mais il ne faut pas oublier que le distributeur Enedis est une filiale à 100% d'EDF… qui vit en nous vendant de l'électricité et qui, déjà proche de la faillite, n'aurait assurément pas autorisé un programme sabrant ses rentrées financières. De toute façon, alors que le déploiement des Linky n'en est qu'à son début, il apparait déjà un peu partout que, loin de permettre des économies, ces compteurs démultiplient beaucoup de factures et obligent de nombreux usagers à prendre un abonnement plus cher pour ne pas disjoncter continuellement.
Les députés LREM démontrent qu'ils sont autant "hors-sol" que leurs prédécesseurs en avouant d'abord qu'ils ne sont que des courroies de transmission au service de l'Elysée, promouvant "la transition énergétique promue actuellement au plus haut sommet de l’Etat français". Mais le plus édifiant est qu'ils prétendent - peut-être le croient-ils vraiment ! - qu'"il n’existe pas de dysfonctionnement et ou de plainte généralisés."
Or, les innombrables articles de la presse quotidienne régionale en attestent, plus de 500 municipalités (de tous les bords politiques) s'opposent aux compteurs communicants, des centaines de collectifs "Stop-Linky" se démultiplient partout en France, et leurs réunions d'information réunissent des salles bondées où les gens viennent se plaindre de tous les maux que les compteurs Linky leur font déjà subir : surfacturations, incendies, dysfonctionnements ou même destructions des appareils électroménagers, sans oublier les diverses exactions opérées sur la population par les sociétés privées mandatées par Enedis pour imposer les compteurs communicants.
Par ailleurs, concernant les ondes et la question sanitaire, le texte se contente de reprendre mot pour mot les éléments de langage de l'industriel Enedis, oubliant d'ailleurs que les Linky doivent être dotés dans un second temps des ERL (émetteurs radio Linky) qui vont transformer chacun de ces compteurs en puissant émetteur wi-fi : les mesures effectuées aujourd'hui ne peuvent donc mettre en évidence les émissions générées demain. Il est d'ailleurs évident que cette opération en deux temps n'est pas fortuite et vise à tromper la vigilance citoyenne et à permettre aux agences d'Etat d'être parfaitement rassurantes… le temps que les Linky soient installés.
D'autre part, il faudrait être bien naïf pour accorder le moindre crédit aux belles assurances données concernant l'utilisation des innombrables données qui vont être captées sur nos vies par les compteurs Linky : une foi ceux-ci installés, il faudra 5 minutes au gouvernement en place, que ce soit dans 3 ou 5 ou 10 ans, pour décréter que, finalement, ces données seront utilisables sans l'accord des usagers.
On peut d'ailleurs prédire l'utilisation des bons vieux arguments comme "Ceux qui n'ont rien à cacher n'ont rien à craindre" ou "De toute façon, il y a déjà Facebook et les téléphones mobiles". Or nous avons le droit de protéger notre vie privée et il est fortement conseillé de se méfier des réseaux sociaux et des opérateurs téléphoniques. La seule façon d'être certain de ne pas être espionné par un compteur communicant est… d'avoir un compteur ordinaire.
Pour finir, il faut dire haut et fort que la question des Linky est avant tout une question démocratique, et qu'il est insensé que, dans un pays dit démocratique, tous les moyens soient utilisés pour imposer des compteurs communicants à d'innombrables citoyens qui n'en veulent pas. Une des caractéristiques du macronisme - et de ses députés godillots - est d'être "en marche" forcée vers un implacable totalitarisme numérique, lequel fera sous peut passer les services comme la securitate et la stasi pour d'archaïques amateurs.
Stéphane Lhomme
Conseiller municipal de Saint-Macaire (Gironde)
Animateurs du site web http://refus.linky.gazpar.free.fr
LE MONDE ECONOMIE | 02.03.2018
« Les compteurs Linky sont un outil majeur au service de la transition énergétique »
Vingt-six députés de La République en marche prennent parti, dans une tribune au « Monde », en faveur du déploiement des « compteurs intelligents » d’Enedis.
Tribune. Les compteurs Linky, dont le déploiement par Enedis est en cours sur tout le territoire, n’en finissent plus de susciter des débats : sur leurs coûts, sur leurs effets présumés sur la santé, sur les enjeux liés aux données personnelles, sur des dysfonctionnements supposés répétés.
Il est urgent et nécessaire de faire preuve de pédagogie sur ce sujet, car les compteurs Linky sont un outil majeur au service de la transition énergétique. Outre la simplification évidente qu’ils représentent pour les opérateurs, ils permettent de piloter plus efficacement le réseau, d’intégrer de nouveaux moyens de production, de nouvelles formes de consommation et, surtout, ils permettent aux consommateurs de mieux connaître et donc de mieux maîtriser leur consommation électrique.
Cet accès à l’information pourrait permettre jusqu’à 23 % d’économies d’énergie, selon une étude du CNRS (« What do people “learn by looking” at direct feedback on their energy consumption ? Results of a field study in Southern France », Adnane Kendel, Nathalie Lazaric, Kevin Maréchal - CNRS, Universités de Nice Sophia Antipolis et de Liège -, Energy Policy n° 108, septembre 2017).
Huit millions de consommateurs déjà équipés
Il nous semble que c’est une chance car c’est une composante majeure de la transition énergétique promue actuellement au plus haut sommet de l’Etat français. Le déploiement de ces nouveaux compteurs, prévu par la loi de transition énergétique, est une composante qui est chère aux députés de la nation que nous sommes. Au 31 décembre 2017, près de huit millions de consommateurs sont déjà équipés de compteurs Linky. Il n’existe pas de dysfonctionnement et ou de plainte généralisés.
Les ondes émises par le système Linky sont du même ordre de grandeur que celles émises par un téléviseur ou un écran cathodique
Sébastien Lecornu, secrétaire d’Etat auprès de Nicolas Hulot, ministre de la transition écologique et solidaire, l’a rappelé le 7 janvier au premier forum de l’intelligence énergétique : « La Cour des comptes a souligné la pertinence de Linky à la condition que nous en utilisions toutes les potentialités. » Cela passe notamment par une meilleure communication sur l’accès du consommateur à ses données énergétiques, afin de réduire sa consommation. Deux points de friction perdurent cependant : l’enjeu sanitaire et la sauvegarde de la vie privée. Il convient sur ces deux points de communiquer davantage.
Concernant la question sanitaire, l’Agence nationale des fréquences (ANFR) et l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris) ont mené des campagnes de mesures sur le terrain et en laboratoire. Leurs résultats sont clairs : le champ électrique du compteur Linky varie entre 0,25 et 0,8 volt par mètre à 20 cm (la valeur limite réglementaire étant de 87 volts par mètre), ce qui est très faible. Ces résultats ont été confirmés par l’étude de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) : les ondes émises par le système Linky sont du même ordre de grandeur que celles émises par un téléviseur ou un écran cathodique, et sont inférieures à celles générées par des plaques de cuisson !
Confiance dans l’action de nos institutions
Concernant les données personnelles, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) tout comme l’Agence nationale des systèmes d’information veillent. Seule la consommation globale d’électricité est transmise pour l’information personnelle de l’usager sur son espace sécurisé en ligne, pour la gestion du contrat électrique, ou pour effectuer des diagnostics énergétiques précieux dans le cadre de la transition énergétique actuelle. Le tout étant crypté et anonyme.
Nous invitons tous ceux qui resteraient sceptiques ou inquiets à se pencher sur le texte de loi relatif à la protection des données personnelles qui vient d’être adopté en première lecture à l’Assemblée nationale. Nous, députés de la majorité, nous nous employons à simplifier la réglementation en matière de données tout en garantissant la vie privée des citoyens.
Paul Valéry disait : « En somme, à l’idole du Progrès répondit l’idole de la malédiction du Progrès ; ce qui fit deux lieux communs. » Nous invitons chacun à ne pas se fier aux postures et à la désinformation en ayant confiance dans l’action de nos institutions et des opérateurs historiques de l’électricité en France.
Les vingt-six signataires de la tribune, tous députés (LRM) : Adrien Morenas ; Sophie Beaudoin-Hubiere, Hervé Berville, Grégory Besson-Moreau, Fannette Charvier, Jennifer De Temmerman, Nicole Dubre Chirat, Françoise Dumas, Jean-Luc Fugit, Séverine Gipson, Olga Givernet, Emilie Guérel, Pierre Henriet, Catherine Kamowski, François-Michel Lambert, Frédérique Lardet, Sandra Marsaud, Thierry Michels, Claire O’Petit, Catherine Osson, Patrice Perrot, Béatrice Piron, Pierre-Alain Raphan, Véronique Riotton, Bertrand Sorre et Frédérique Tuffnell.