Publié le 21 décembre 2018 par werdna01
La Décroissance – décembre 2018 – Stéphane Lhomme –
Va-t-on finir par fermer des réacteurs en France ? Après les promesses non tenues de François Hollande, Emmanuel Macron assure que la centrale de Fessenheim fermera sous son quinquennat, en 2020… peut-être. Et après, on verra : on ne fermera pas d’autres réacteurs avant 2025, les centrales chaudes seront donc refilées à son successeur. Dans le même temps, les pouvoirs publics continuent de promouvoir une consommation croissante d’électricité en subventionnant massivement la filière des véhicules électriques. Une aberration écologique.
Après une longue attente, Emmanuel Macron a enfin annoncé sa programmation pluriannuelle de l’énergie. Concernant le nucléaire, l’information la plus cruciale, mise en avant par les médias, est celle-ci : le gouvernement prévoit la fermeture de 4 à 6 réacteurs d’ici 2030. Hourra, eurêka, hosanna ! Eh bien quoi, me répondrez-vous, pas de quoi s’enflammer ainsi pour un objectif aussi faible et, surtout, pour ce qui n’est encore une fois qu’une jolie promesse : où sera donc Macron en 2030 pour tenir son engagement ?
Autrement, il y a aussi l’engagement de fermer la centrale de Fessenheim (Alsace) « avant la fin du quinquennat », « sans doute en 2020 », comme l’a indiqué François de Rugy. Voyons, voyons, nous avons déjà entendu ça quelque part… Mais bien sûr, c’était déjà la promesse de Hollande… pour le précédent quinquennat (2012-2017).
Débranchons les voitures électriques
Autre plaisanterie annoncée par Macron et son gouvernement, des aides publiques massives pour tenter (vainement) de développer la voiture électrique. Nous avons déjà largement expliqué les raisons pour lesquelles ce véhicule est une calamité environnementale au même titre que la voiture thermique (essence ou diesel) (La Décroissance N°113). Rappelons juste que c’est le cas même par rapport au climat : la fabrication des batteries d’une voiture électrique émet en CO2 l’équivalent de 10 à 15 ans d’utilisation d’une voiture thermique. Qui plus est, tout ce CO2 est émis avant même que la voiture électrique n’ait parcouru le moindre centimètre, et il fait immédiatement tout son effet… de serre.
Pourtant, parce qu’il faut bien avoir quelque chose à proposer quand on est ministre ou élu (et qu’on souhaite le rester), les gouvernants tentent de développer la voiture électrique inlassablement… et vainement. Ainsi, malgré les puissantes campagnes de publicité sur tous les supports et les bonus abusivement prétendus « écolos », les ventes de voitures électriques restent scotchées depuis des années aux alentours de 1,2 %, une misère !
Cerise sur la gâteau, à l’heure où nous écrivons, un des plus fervents promoteurs de la voiture électrique, le PDG de Renault-Nissan Carlos Ghosn, est mis en arrestation au Japon : bien que doté d’un des plus gros salaires parmi les dirigeants industriels mondiaux, le bonhomme aurait omis de déclarer au fisc une part importante de ses revenus. Et il aurait utilisé à des fins personnelles les biens de l’entreprise : un voilà un qui n’était pas très décroissant… mais qui risque bien de le devenir en cellule !
Autre charmante nouvelle sur le front des déplacements prétendus « verts », les voitures électriques Autolib mises en place depuis plusieurs années à Paris et en Ile-de-France ont été débranchées. Non pas par des militants ayant suivi le bon exemple de votre serviteur – il s’agissait de débrancher les Autolib, ce qui était très facile car elles étaient en charge sur la voie publique – mais carrément par les collectivités territoriales : le programme était ruineux !
On voit donc que la voiture électrique a largement du plomb dans l’aile, ce qui n’empêche pas la fameuse PPE * de tenter encore et toujours de la faire décoller. « En même temps, nous pensons que oui, la voiture, la voiture a un avenir en France. Nous voulons produire des voitures qui consomment moins, qui polluent moins, en innovant, en créant de l’emploi industriel« , implorait ainsi Emmanuel Macron le 27 novembre 2018 lors de son discours « relatif à la stratégie et à la méthode pour la transition écologique« .
Mais voilà qu’un autre carambolage se produit dans l’actualité : le fronde des « gilets jaunes » contre l’augmentation massive des taxes qui démultiplient le prix de l’essence et du diesel. Ce mouvement est avant tout une révolte sociale des petits contre les riches, représentés par la personne de Macron : en cela, c’est tout de même un mouvement intéressant. Sauf qu’on y retrouve plus son latin : les taxes sur l’essence relèvent-elles de la « fiscalité écologique » comme le prétend le gouvernement ? Ou plutôt une façon de prendre dans les poches des pauvres les derniers euros qui leur reste !
Bien entendu, il reste la possibilité de se déplacer à vélo, ou à pied, ou même rester chez soi. Voilà qui simplifierait la PPE : plus de consommation, plus de voitures (électriques ou thermiques), plus de centrales nucléaires et de stations-service pour les alimenter. Un vrai rêve !
* La « programmation pluriannuelle de l’énergie » (PPE) est, en France, un document stratégique de pilotage de la transition énergétique.