mercredi 2 février 2011
par Sylvie Simon
Dans la liste des médicaments sous surveillance avec un « suivi renforcé » dont on nous rebat les oreilles afin de nous rassurer, on découvre avec surprise les vaccins Gardasil®, et Cervarix®, alors que pendant des mois nous avons dû subir une publicité éhontée pour le Gardasil® — plus utilisé en France que son cousin le Cervarix® car le premier est commercialisé par Pasteur Sanofi (laboratoire français), le second par Glaxo Smith Kline (anglais) —, tous deux ciblant le papillomavirus et non un quelconque cancer.
Du jour au lendemain, ce vaccin considéré comme une découverte majeure est passé du stade de vedette à celui de suspect. En effet, en automne 2008, pour le 120ème anniversaire de l’Institut Pasteur, on pouvait entendre sur toutes les ondes que sa dernière « découverte » était le « vaccin contre le cancer du col de l’utérus », quand ce n’était pas contre « le cancer » sans autre précision, ce qui est un énorme mensonge car il n’existe aucun vaccin contre les cancers. En vérité, il s’agit d’un vaccin contre le papillomavirus car les cancers du col sont parfois dus au HPV (Human Papilloma Virus), ce qui n’est pas la même chose : ce virus n’entraîne pas d’office le cancer et des cancers se déclarent chez des femmes n’ayant jamais été en contact avec le papillomavirus. Il est exact qu’il existe une corrélation entre HPV à haut risque et cancer du col, mais 90 % des infections sont asymptomatiques et guérissent sans traitement. Dans ce cas, les lésions intra-épithéliales régressent spontanément, et l’HPV n’est plus détectable dans le col. L’Institut national du cancer des États-Unis estime que la relation directe entre le virus et le cancer n’est pas du tout prouvée. Dans une étude officiellement contrôlée, 67 % des femmes ayant un cancer du col et 43 % de femmes sans cancer étaient positives au test HPV. Ces cancers sont en général observés seulement 20 à 50 ans après l’infection.
Mais, dans sa liste de produits sous surveillance, l’Afssaps elle-même n’hésite pas à préciser que le Gardasil® est un vaccin contre les « lésions précancéreuses » et le « cancer du col » ; voilà sans doute la « transparence » demandée par notre ministre de la Santé. Ce vaccin fait partie des produits pharmaceutiques qui ont engendré de très nombreux mensonges. Ainsi, le Gardasil®, fabriqué par manipulation génétique — encore un OGM —, a été mis au point par le laboratoire Merck, et l’Institut Pasteur n’est pas le découvreur du vaccin mais seulement son distributeur. Le Gardasil® est commercialisé en France par Sanofi Pasteur MSD (MSD pour Merck), car ce nom est plus porteur que celui de Merck, qui a été condamné pour mensonge aggravé au sujet du Vioxx®, lequel a bénéficié d’une publicité identique à celle du Gardasil® avant d’être retiré du marché à cause des 160 000 accidents dont 50 000 décès qu’il a générés sur le seul territoire des États-Unis. En France, comme de coutume, l’opacité totale règne sur ces effets secondaires.
La campagne orchestrée par Sanofi Pasteur MSD pour la promotion du Gardasil®, a eu lieu sous le regard très bienveillant de nos autorités de santé, particulièrement du ministre Xavier Bertrand qui le considérait alors, sans aucune preuve, comme une « avancée majeure de santé publique ». À la surprise générale, il a annoncé à l’Assemblée nationale que ce vaccin serait remboursé à 65 % avant la fin du 1er trimestre, deux mois avant que la commission de la HAS (Haute Autorité de Santé publique) ne rende son avis. Pourquoi était-il si pressé alors que ce n’est qu’en avril 2007, que la Haute autorité de santé a rendu un avis favorable sur ce vaccin, tout en admettant qu’en l’état du dossier, son efficacité au-delà de 5 ans n’était pas établie ? En outre, à la grande stupéfactions des spécialistes, l’AMM a été donnée en un temps record, soit 9 mois entre le dépôt de la demande et son obtention en juin 2006, alors que cette démarche demande la plupart du temps plusieurs années. Quant à la commission chargée du remboursement du vaccin, il lui était difficile de le refuser puisque le ministre l’avait déjà annoncé. Il est certain que sans sa prise en charge par la Sécurité Sociale, ce vaccin n’aurait pas joui d’un tel succès, étant donné sn prix excessif.
On comprend mieux la célérité de cet avis favorable lorsqu’on apprend qu’il s’est basé sur l’étude Édith III, publiée dans la revue Gynecologic Oncology d’août 2008 (volume 110, issue 2) et signée par Pretet JL, Jacquard AC, Saunier M, Clavel C, Dachez R, Gondry J, Pradat P, Soubeyrand B, Leocmach Y, Mougin C, Riethmuller D. Cette étude qui compare la distribution des génotypes HPV dans les dysplasies et les cancers invasifs du col de l’utérus sert de référence pour démontrer l’utilité du vaccin, mais on n’y trouve aucune indication de liens d’intérêts qui unissent plus de la moitié des signataires de l’étude et le laboratoire qui commercialise le Gardasil®. Pharmacritique, qui analyse les rapports entre l’industrie pharmaceutique, la médecine et les usagers, a étudié et publié les liens d’intérêts de l’équipe française. L’information est édifiante. Jean-Luc Prétet et Didier Riethmuller sont des consultants pour Sanofi Pasteur MSD, Benoît Soubeyrand, Yann Leocmach et Anne-Carole Jacquard sont des salariés de Sanofi Pasteur MSD qui ont développé et commercialisé le vaccin Gardasil®, et Christine Clavel fut conférencière pour le compte de Sanofi Pasteur MSD lors de la réunion internationale Eurogin 2007, sur le cancer du col de l’utérus. Et sous la rubrique « Remerciements », de l’étude, on peut lire : « Nous manifestons notre gratitude à Emilie Maillard, de Therapharm, Boulogne-Billancourt, France, pour la gestion et l’analyse des données, ainsi qu’à Nubia Muñoz pour sa lecture critique du manuscrit ».
Or, Therapharm est une société de recherche sous contrat avec Sanofi Pasteur MSD et « partenaire essentielle de l’industrie pharmaceutique » depuis 1980. On apprend sur son site que Terapharm fait tout pour ses clients, de la recherche jusqu’à « la rédaction d’articles ». Et Nubia Muñoz a toujours affirmé que la vaccination de toutes les adolescentes vers l’âge de 11-12 ans est une « mesure de santé publique prioritaire. » Quant au Pr Riethmuller, qui est aussi gynécologue obstétricien de l’hôpital Saint Jacques à Besançon, membre du Collège national des gynécologues et obstétriciens, il a déclaré journal 20 minutes : « Avec l’arrivée du Gardasil®, ce cancer peut devenir anecdotique d’ici à vingt ans ». « Mais est-ce le médecin qui parle ou le consultant pour Sanofi Pasteur MSD ? » demande Pharmacritique. « Le Pr Riethmuller nous en a mis plein la vue avec une superbe présentation en couleurs des résultats de l’étude Édith, mais vous aurez beau chercher, vous ne trouverez nulle part la moindre mention de ses liens avec Sanofi Pasteur MSD. Non seulement ses conflits d’intérêts ne sont pas mentionnés dans les présentations qu’il fait, mais ils ne sont accessibles nulle part dans les revues françaises qui publient ses textes. »
Même si l’on croie à leur impartialité, ce qui est quasiment impossible, il n’est pas normal que les politiques de santé publique, coûteuses avec une efficacité encore inconnue, soient gérées par des médecins liés financièrement aux laboratoires, certains ayant même plusieurs casquettes. Ainsi, dans le groupe de travail « Stratégies de dépistage du cancer du col de l’utérus », on remarquait la présence de Jean-Jacques Baldauf, « investigateur principal » sur le Gardasil® pour Sanofi Pasteur, et Brigitte Letombe, qui travaille pour la communication de Sanofi depuis janvier 2009. D’autant que le Gardasil® a été mis sur le marché mondial en toute hâte, alors que les deux études décisives de phase III n’étaient pas encore achevées. Cette célérité est due à deux biologistes experts, les Dr John Boslego et Alan Shaw, qui faisaient partie du groupe chargé de l’approbation du vaccin « en toute indépendance » alors qu’ils étaient employés par Merck. Et lors de la seconde conférence de la National Cervical Cancer Coalition, qui s’est tenue à Los Angeles en octobre 2008, quatre des sept intervenants avaient reçu des fonds de Merck, Glaxo et autres laboratoires, impliqués dans la recherche sur le HPV, afin « d’aider » les conférenciers, bien que ces dons n’aient pas été mentionnés. Nous retrouvons encore et toujours des « experts » qui sont juge et partie, mais prétendent ne pas être influencés par ces liens.
D’autre part, d’après l’AHRP (Alliance for human research protection), les essais étaient d’autant plus faussés que la FDA a autorisé l’utilisation de placebos contenant de l’aluminium au lieu d’une solution saline non réactive, ce qui a augmenté l’apparente sécurité du vaccin au cours de ces essais. Il faut aussi savoir que cette vaccination n’a été évaluée, lors des essais cliniques, que sur des jeunes femmes de plus de 16 ans, alors qu’elle est préconisée dès 11 ou 12 ans et même plus jeune, selon les pays. Autre question : ce remboursement était « limité aux adolescentes de 14 ans et aux femmes de 15 à 23 ans n’ayant pas encore eu de rapports sexuels. » Quelles sont les femmes qui, à 23 ans, n’ont pas encore eu de rapports sexuels à notre époque ? Et si elles en ont eus, qui peut le vérifier avant de les rembourser ? Et les gynécologues qui le conseillent fortement — ils sont très nombreux — se gardent bien de dire, sans doute l’ignorent-ils, que les documents soumis à la FDA font état d’un risque fort supérieur de dysplasies moyennes, sévères ou pire chez les femmes qui ont déjà été en contact avec les génotypes HPV 16 et 18 avant cette vaccination. Il est question d’un risque quantifié d’augmentation de plus de 44,6 % de dysplasies par rapport aux femmes du groupe placebo.
Heureusement, après tout le battage fait en sa faveur, sa publicité est interdite et l’Afssaps admet enfin que : « En l’état actuel des données, il n’y a pas d’étude démontrant un effet préventif de la vaccination sur la survenue des cancers, le délai entre l’infection et l’apparition d’un cancer invasif étant estimé à quinze à vingt-cinq ans. » Il n’est donc absolument pas établi que le vaccin Gardasil® prévienne le cancer du col de l’utérus alors qu’il est remboursé à 65 % par l’Assurance maladie et recommandé par de très nombreux médecins. Quant à la Revue Prescrire de janvier 2011 (tome 31 N° 327) elle signale : « Après un suivi médian de 4 ans, si on prend en compte l’analyse portant sur le nombre de femmes ayant au minimum une dysplasie cervicale de haut grade (2 ou 3) due à n’importe quel génotype ou une lésion génitale externe, et ayant reçu au moins une dose vaccinale quelque soit le statut sérologique en début d’essai, le vaccin n’est pas plus efficace que le placebo. »
Et c’est pour ce « placebo » qui présente bien des dangers comme nous le montrerons dans un prochain article, que la Sécurité Sociale a déjà dépensé des millions dont elle aurait pu faire un meilleur usage. Rassurons-nous, nos politiques nous parlent de la transparence nécessaire dans les organismes de « santé » qu’ils ont mis en place.
Source : http://www.altermonde-sans-frontiere.com/spip.php?article15821