Edmond Aussel, maire, (à droite sur la photo) et son 1er adjoint Didier Manzon solliciteront
les représentants de RFF pour déplacer plus à l'ouest la future ligne LGV. /Photo DDM E.H
Publié le 27/09/2012 08:07
Il y a trois mois à peine, les habitants croyaient le projet de ligne à grande vitesse bel et bien validé. À l'issue d'une lutte de longue haleine pour préserver leur qualité de vie impactée par le grand chantier, certains s'étaient donc résolus à abandonner leur maison que le tracé n'avait pu épargner, pendant que d'autres poussaient un ouf de soulagement, contents d'avoir échappé à l'expropriation. Et dans les deux cas, tous commençaient à digérer la grande mutation annoncée. Malheureusement pour tous ces habitants, le travail d'acceptation d'un tel chamboulement n'aura servi à rien ! La nouvelle est tombée, dans la douceur estivale : la future ligne, sur cette commune et celle de Pompignan, devrait être décalée d'une cinquantaine de mètres ! «Les bras m'en tombent», lance Edmond Aussel, maire de Saint-Rustice: «Cela a été ma réaction quand j'ai reçu ce coup de téléphone m'invitant à rencontrer des gens de Réseau Férré de France qui nous ont annoncé que le tracé du TGV allait être optimisé».
«Quels changements !»
En montrant le nouveau document sur lequel figure la future ligne, le maire décrit les changements. Ils sont notoires pour une population a du mal à comprendre (lire ci-dessous). Le maire en a conscience tout en étant un peu désemparé : «Vous n'imaginez pas ce que vivent ceux qui étaient épargnés et sont aujourd'hui directement touchés ! C'est certes 4 maisons alors que le premier schéma en détruisait entre 7 à 10, mais quel changement ! De plus, dans le premier schéma, on devait nous faire un nouveau pont sur le canal et un rond-point. Dans le second, il n'y figurent pas. Il n'est pas question qu'on se prive de pont et qu'on aille chercher à Pompignan la route qui nous permettra de remonter au centre du village lorsque l'on est en bas ! Et Bref, il faut tout reprendre à zéro».
Pour Edmond Aussel, la solution la moins impactante consisterait à «éloigner un peu plus la ligne, vers l'ouest.» C'est cette position qu'il défendra mardi prochain lors d'une commission consultative prévue avec RFF. Contacté hier, son directeur régional, Christian Dubost, a bien confirmé les changements expliquant que «lorsque l'on pouvait faire mieux et moins cher, il n'y avait pas de raison de se priver ! «Et d'ajouter : «l'insertion dans le territoire est meilleur avec ce schéma, et moins de maisons sont impactées. On a profité de l'été pour se pencher sur cette question parcequ'on a eu plus de temps. Ce projet est vraiment optimisé.».
Reste maintenant à faire passer la pilule aux «nouveaux futurs expropriés» mais également à ceux qui conserveront leur demeure, des familles qui devront vivre avec un train à parfois 80 mètre de leur fenêtre… Les débats ne font que (re) commencer.
AZS:«Contrela LGV!»
Erik Subtil, parle de l'association AZS qu'il préside : «L'association a pour but de défendre les riverains du projet, à aider ceux qui veulent partir aussi bien que ceux qui veulent ou ne peuvent pas faire autrement que de rester. A ce qu'ils le fassent aux meilleures conditions, dédommagement financier, aménagement contre les nuisances etc.Nous ne sommes pas contre le TGV mais contre la LGV.On peut aménager les voies existantes. En tout cas pour tous ici c'est l'incompréhension et le désespoir.»
«Ma maison sauvée ne vaudra rien»
Didier Manzon> horticulteur , à quelques années de la retraite. «Avec l'ancien projet, ma maison et mes serres sautaient. Je m'étais fait à cette idée bien qu'étant contre la LGV, trop chère et inutile d'après moi. Je serais parti ailleurs. Maintenant tout reste, les serres et la maison. Pas de problème pour les serres, je peux habiter ailleurs et venir y travailler mais la maison? Comment vivre à 50 m d'une ligne grande vitesse? La vie sera impossible et si je veux vendre la maison , à la retraite, ou mes enfants ensuite, elle sera sauvé mais n'aura plus aucune valeur! En plus on aura sous les yeux une butte de plusieurs mètres de haut. Avec le projet précédent on avait négocié un projet d'aménagement des voies routières: un nouveau pont sur le canal et la voie ferrée et un rond point au niveau de la départementale. Là c'est remis en question. Je n'ai plus du tout confiance en RFF».
Monique et Roger Rey> arboriculteurs. «Avec l'ancien projet on perdait une partie des vergers mais surtout l'accès au puits, la station de pompage sautait et on n'avait plus accès à l'eau qui nous est indispensable pour les arbres fruitiers en particulier dans la lutte contre le gel. Maintenant avec ce recul de quelques 80m, la station reste, le même nombre d'hectares nous est pris.»
MONIQUE REY> élue. : «Aucune des promesses faite après négociation avec RFF ne sera tenue ! Il n'y aura plus de viaduc qui est tout de même moins impactant que le remblai de terre qui bouchera tout et surtout qui aura une emprise au sol bien supérieure ! plus d'aménagement de la route, d'un nouveau pont...on déhabille Pierre pour habiller Paul.»
Sylvie et Thierry> jeune couple deux enfants.«La maison était sur le tracé on s'était fait à l'idée de la voir démolie de partir. Maintenant on reste mais à 40 ou 50 m de la ligne ! On devra supporter des nuisances continuelles. Et il n'y aura sans doute pas d'indemnisation car on sera trop loin pour RFF ! C'est une catastrophe pour nous. On ne fait même plus des travaux sur cette maison, on voulait changer le mode de chauffage mais....On ne pourra pas rester là et on perdra beaucoup. On fait partie de la nouvelles association créée pour défendre les droits des riverains, pour aider légalement ceux qui veulent rester ou partir à le faire dans de meilleurs conditions».
Eric Subtil> président de AZS- St Rustice (association zone sinistrée st Rustice). «Ma maison ne saute pas mais j'ai la ligne à 100m maximum ! Comment vivre dans ces condition ? Les gens sont désespérés même s'ils ne l'expriment pas fort, en plus ils ne se sentent pas soutenus ni par la municipalité ni par le Conseil général, c'est bien différent du Tarn et Garonne et même de Pompignan le village voisin! On a le sentiment que RFF ne tient absolument pas en compte les gens mais seulement les impératifs financiers, nous on ne compte pas !»
Propos recueillis par Colette Berthes