Réseau ferré de France (RFF) lance un cri d'alarme sur la situation des voies ferrées
françaises qui pourraient être en partie abandonnées faute de crédits pour assurer leur
maintenance.Francois Nascimbeni
01.12.2010, 13h39
Réseau ferré de France (RFF) lance un cri d'alarme sur la situation des voies ferrées françaises qui pourraient être en partie abandonnées faute de crédits pour assurer leur maintenance. "Le financement du renouvellement du réseau n'est pas assuré sur le long terme, y compris celui emprunté par les TGV", s'inquiète Alain Sauvant, directeur de la stratégie de RFF, le gestionnaire public des voies ferrées françaises.
Si les lignes à grande vitesses parcourues à 300 ou 320 km/h ne sont pas concernées, RFF s'inquiète pour l'état des lignes classiques empruntées par les TGV pour atteindre leur destination finale: "on risque de ne plus avoir un réseau en état pour accueillir les trains", souligne-t-il. Ce constat est évidemment valable pour le reste du réseau. Explication: alors que le "coût complet" du réseau ferré --qui comprend l'entretien des voies et leur renouvellement quand elles sont vraiment trop usées-- est estimé à environ 6,5 milliards d'euros par an, les revenus de RFF ne couvrent que 83% de cette somme.
Grâce à une augmentation des péages --les droits de passage que paient les compagnies pour faire passer leurs trains--, le coût de l'entretien courant est désormais couvert. Mais il n'en va pas de même pour le renouvellement, si bien qu'une bonne partie du réseau est menacée d'obsolescence à plus ou moins long terme. Avec le soutien de l'Etat et de certaines régions, des plans de remise à niveau des voies ferrées ont bien été mis en œuvre, si bien que le rythme a doublé à environ 2.000 km de voies refaites tous les ans (sur 53.000 km de voies), mais cela ne devrait pas suffire pour sauver une partie du réseau qui est déjà proche du délabrement, avec ses ponts centenaires ou ses aiguillages d'avant-guerre. Et les trains sont souvent ralentis, parce que la ligne n'en peut plus.
Que faire, alors? RFF a essentiellement deux sources de revenus: les recettes des péages, qui devraient continuer à progresser, au grand dam de la SNCF, et les subventions publiques. Or, dans ce dernier cas, l'Etat vient de réduire son aide au motif que les péages augmentaient...
Le groupe public doit aussi rechercher des gains de productivité, pointe sa directrice générale adjointe Véronique Wallon. Mais il n'a pas les coudées franches, puisqu'il est tenu de sous-traiter la quasi-totalité de la maintenance du réseau à la SNCF (qui elle aussi, se plaint de perdre de l'argent sur cette activité). "L'entretien coûte de plus en plus cher", regrette-t-elle, notant que l'"inflation ferroviaire" est nettement supérieure à la hausse des prix à la consommation.
"Tout cela ne veut pas dire qu'on ne fait pas ce qu'il faut pour entretenir le réseau. A court terme, la vie continue", rassure Hubert du Mesnil, le président de RFF. "Mais si dans les cinq ans qui viennent, on n'a pas atteint les 100% de nos coûts complets, on aura peut-être, d'ici 2020, environ 20% du réseau en difficulté", prévient-il.
Du coup, les regards se portent évidemment vers les "petites lignes", celles qui ne voient passer que quelques trains par jour. Et il y en a beaucoup, puisque la moitié du réseau ferré français --long d'un peu plus de 29.000 km de lignes-- ne voit passer que 10% des trains. Parmi ces lignes "peu circulées", il faudra notamment en rénover 4.000 km après 2015. "Ce n'est pas à nous de dire qu'il faut fermer des lignes. Il faut que l'Etat nous dise quelle est la consistance du réseau qu'il veut", souligne Hubert du Mesnil.
Et le patron de RFF de conclure: "en France, on aime beaucoup les grands projets. Les projets que nous préférons, c'est la modernisation du réseau. Et ce que nous aimerions, c'est qu'il y ait davantage de trains!"