Marie Delaplace
jeudi 25 février 2010
La LGV sera inaugurée en 2014 à Rennes. Pour Marie Delaplace, spécialiste de l'impact socio-économique des dessertes ferroviaires, il faut se méfier de certains mythes.
Entretien
Le projet EuroRennes est l'un des thèmes phares de la politique d'aménagement rennaise des années à venir. Un noeud multinodale avec l'arrivée de la LGV en 2014, de la deuxième ligne de métro en 2018, l'aménagement des 180 000 m2du quartier de la gare avec des nouveaux immeubles, des commerces, des bureaux, pour un investissement de 3,4 milliards d'euros.
Tout ça grâce à la LGV ? « On a tendance à croire que la seule présence de la LGV suffit à apporter quelque chose à la ville mais c'est faux » explique Marie Delaplace. Maître de conférence à l'Université de Reims Champagne-Ardenne, elle mène des recherches sur les impacts socio-économiques des dessertes ferroviaires.
Une vitrine pour la ville
« Dans le domaine de l'immobilier d'entreprise, les promoteurs et les collectivités espèrent attirer des nouvelles entreprises. On remarque que, si les immeubles construits trouvent rapidement preneurs, ce sont surtout des entreprises locales qui s'y installent. C'est l'effet d'aubaine. » D'où une idée fausse que les grandes entreprises nationales et européennes accourent dès qu'une LGV est mise en place. De plus, « ces entreprises n'utilisent pas ou peu la LGV : c'est la recherche de bureaux neufs qui les motivent en premier lieu. »
Pour les villes, l'arrivée d'une LGV agit comme une garantie de succès, elle rend moins risqués les investissements. Une nouvelle vitrine pour la ville qui met en avant le développement économique local. « Les collectivités doivent justifier d'un coût souvent très élevé. Elles partent du constat que, dans certaines villes TGV, il y a eu une dynamique. C'est un leurre : cette dynamique ne résulte que d'une rencontre de contexte, de stratégies d'entreprises, de coordinations des acteurs. »
Et du point de vue du tourisme ? Pour Marie Delaplace, la ligne à grande vitesse ne dynamise le tourisme que de manière ponctuelle. « La mobilité facilitée permet de développer le tourisme urbain sur des ressources déjà connues. Prenez l'exemple du marché de Noël de Strasbourg : il existait avant l'arrivée de la LGV mais les gens profitent du train pour aller le visiter. Le tourisme d'affaire est aussi facilité. La durée des séjours est réduite : si les gens peuvent venir plus facilement, ils peuvent aussi repartir plus rapidement ! »
Alors quels sont les atouts d'un nœud multinodal comme EuroRennes ? « La qualité de vie pour les usagers, une valorisation de la ville et de la région, un effet d'image et de modernité. Présenter son projet comme un pôle économique majeur est peut-être un peu précipité. »
Marie CAROF-GADEL