Communiqué de presse – 7 septembre 2011
Ce mercredi 7 septembre, un non-lieu vient d’être accordé au Pr. Pierre Pellerin, artisan principal de la désinformation sur les impacts sanitaires du passage du nuage de Tchernobyl.
En 1986, par la voix de Pierre Pellerin, alors directeur du Service Central de Protection contre les Rayonnements Ionisants, l'État français a délibérément minimisé le niveau de contamination de la France par le nuage de Tchernobyl.
Alors que tous les autres pays européens, conscients des risques du cocktail mortel de radioéléments dispersés par la centrale ukrainienne, adoptaient des mesures pour protéger leurs populations, la France a propagé le message mensonger d’une absence de risques sur la santé humaine. Elle a délibérément privé les populations de mesures de protection contre la radioactivité : pas de consignes regardant la nourriture irradiée, pas d’incitation à ne pas s’exposer à la pluie radioactive ni à empêcher les enfants de jouer dans les bacs à sable, pas même de distribution de comprimés d’iode stable…
Cette absence de mesure de protection par l'État français constitue un véritable crime dont on possède le mobile : en avril 1986, il restait 23 réacteurs à construire ou à mettre en service industriel en France.
Depuis la catastrophe, l'explosion du nombre de cancers et plus particulièrement de cancers thyroïdiens en France a été parfaitement documentée par le travail de la juge Marie-Odile Bertella-Geoffroy. En particulier, une note sur la progression des prises de Levothyrox, désormais troisième médicament le plus consommé en France, ne laissait pas de doute quant à une corrélation entre le passage du nuage et la multiplication des problèmes thyroïdiens. Pour réunir ces éléments, Mme la juge Berthella-Geoffroy avait effectué des perquisitions dans les ministères, chez EDF, et également au SCPRI, chez le célèbre professeur Pellerin.
Il y a tout lieu de penser que nous sommes ici en face d’un exemple flagrant d’asservissement de la justice au pouvoir politique et aux intérêts du lobby nucléaire : en effet, Mme la juge Bertella Geoffroy a été dessaisie de son travail sur Tchernobyl 4 jours après la catastrophe de Fukushima et 15 jours avant le renvoi du procès à aujourd’hui....
Aujourd'hui donc, honte suprême, la Cour d'appel de Paris vient de voler le procès aux malades de la thyroïde en déclarant un non-lieu pour le Pr. Pellerin dans l'enquête sur les possibles retombées en France de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl.
Pourtant, 25 ans après, les chiffres attestant de la contamination sont là. Une étude publiée par l’Académie de Médecine de New York en 2010 a évalué à près de un million le nombre de décès liés à la catastrophe de Tchernobyl [1]. Un autre rapport publié en 2011 par une association médicale confirme l’augmentation dramatique de la morbidité suite à l’accident nucléaire, non seulement au Bélarus, mais aussi en Europe[2]. En France, la cartographie réalisée par la CRIIRAD a permis de mettre en évidence une contamination incontestable du territoire.
En blanchissant le Pr. Pellerin, la France protège une des figures majeures de la désinformation au niveau international. Rappelons ainsi que M. Pellerin a été l’un des membres du cénacle très réduit d’experts qui se sont accordés sur le nombre de morts à annoncer officiellement, ont critiqué les doses fixées par les pouvoirs soviétiques comme « trop strictes » et préconisé une « dose-vie » équivalente à la dose létale en une heure (1 Sv)[3]. La France a également exporté son savoir-faire en matière de désinformation nucléaire via son implication dans les programmes ETHOS et CORE menés en Ukraine.
L’histoire semble se répéter : la semaine prochaine va se tenir à l’université médicale de Fukushima un symposium international d’ « experts » sur les impacts sanitaires de la radioactivité, organisé à l’initiative de la Fondation Nippon, organisme proche du pouvoir [4]. Parmi les principaux organisateurs, on compte déjà Shunichi Yamashita, un professeur de radiologie qui nie la dangerosité des faibles doses et de l’irradiation interne, et ne voit aucun problème à laisser des enfants subir les mêmes doses de radioactivité que les travailleurs du nucléaire. Aboutira-t-on au Japon aux mêmes conclusions officielles qu’après la catastrophe de Tchernobyl ?
Mais l’affaire lancée depuis des années par l'association de malades de la thyroïde ne sera pas étouffée : l'association devrait se pourvoir en cassation. Alors que 62 % de l’opinion publique internationale souhaite l’arrêt du nucléaire et que les scandales autour de l’atome éclatent désormais au grand jour, le mur de la censure et de la désinformation ne tiendra pas longtemps.
Contacts :
Pour le Réseau « Sortir du nucléaire » : Daniel Roussée – 06 61 97 83 28
Pour les Amis de la Terre Midi-Pyrénées : Daniel Roussée – 06 61 97 83 28
Pour Stop Golfech : Monique Guittenit - 05 53 95 02 92
Notes :
[1] "Chernobyl: Consequences of the Catastrophe for People and the Environment" - Alexey V. YABLOKOV, Vassily B. NESTERENKO, Alexey V. NESTERENKO - Publié en 2010 par l'Académie des Sciences de New York.
[2] "Health Effects of Chernobyl 25 years after the reactor catastrophe" - IPPNW Germany, Gesellschaft für Strahlenschutz, 2011
[3] Wladimir Tchertkoff, Le Crime de Tchernobyl. Le goulag nucléaire, Actes Sud, 2006
[4] http://www.nippon-foundation.or.jp/eng/news/Fukushima_Expert_Symposium.html La Fondation Nippon a été créée par Ryoichi Sasakawa, ancien criminel de guerre.
NB : l'Association Française des Malades de la Thyroïde a besoin d'un soutien financier pour continuer à mener son combat. Les dons sont bienvenus, à adresser à l'adresse suivante : AFMT - BP 1 - 82700 BOURRET