C’est l’hécatombe parmi les phoques d’Alaska. Les animaux souffrent d’ulcères, perdent leurs poils,… Les scientifiques s’interrogent mais certains évoquent un lien avec la catastrophe nucléaire de Fukushima.
Les autorités américaines suivent de près cette mortalité inexpliquée chez les phoques et autres animaux.
C’est le Nome Nugget, le plus ancien journal d’Alaska, qui le rapportait le mois dernier: Gay Sheffield, une scientifique de l’Université d’Alaska qui étudie les effets de la pollution sur la santé de la faune locale a réalisé un macabre bilan. En quelques semaines d’observation, elle a comptabilisé neuf échouages de baleines, 25 échouages de morses, deux de lions de mer et 18 de phoques. Des animaux morts de maladie(s).
En cause? Des déversements de pétrole et autres carburant déversés par des bateaux en sont les causes possibles. Mais aussi sans doute la pollution radioactive venue de Fukushima en est-elle une aussi un, sinon la première.
Dans cette immense région au nord du globe, cela n’étonne qu’à moitié. En 2011 déjà, quelques mois après la catastrophe japonaise, des centaines de phoques morts avaient été découverts par les chasseurs. Symptôme typique et étonnant chez ces phoques: ils n’avaient plus de poils sur la tête et souffraient d’ulcères sur la peau.
Aujourd’hui encore, les chasseurs évoquent des cas d’animaux morts ou malades qui présentent des symptômes de la maladie qui a éclaté en 2011. Cet étrange phénomène fait toujours l’objet d’une enquête fédérale en tant qu’«événement de mortalité inhabituel», relate le journal.
Des cas similaires au Canada, en Russie, au Japon…
Ces animaux présentaient aussi des lésions cutanées, des ulcères, des foies malades, certains avaient la tête blanchie, avaient des difficultés respiratoires et souffraient d’apathie. Des cas de morses souffrant des mêmes maladies ont aussi été observés, note le NOAA (national oceanic and atmospheric administration – US department of commerce).
En février, le NOAA s’était aussi inquiété de cette «mortalité inhabituelle» et élevée chez les phoques d’Alaska et du détroit de Bering. Relevant que des cas similaires étaient aussi observés au Canada, à l’Est de la Russie et… au Japon.
Durant ce printemps, les chasseurs continuent à repérer des phoques sans poils sur certaines parties du corps, principalement chez les jeunes adultes.
«Aucun agent infectieux spécifique ou un processus a été identifié. Cela peut suggérer que la cause sous-jacente de cette maladie est complexe et implique une variété de facteurs. […] Les scientifiques étudient la possibilité que le rayonnement pourrait être un de ces nombreux facteurs […]», indiquait prudemment la NOAA il y a trois mois. Précisant que, après analyses, tous les agents viraux connus pour provoquer ce genre de maladies et d’ulcères de la peau avaient pu être écartés comme cause des cas relevés.
Actuellement, le NOAA poursuit ses tests et analyses sur les phoques malades. En cherchant la cause tous azimuts: maladies auto-immunes, agression fongique, toxines, stress causé par la modification de la banquise ou radiations.
Et les premiers examens préliminaires réalisés par les scientifiques de l’Université d’Alaska Fairbanks ont déjà relevé des traces de radiations, sans qu’elles soient toutefois supérieures à ce qui était enregistré par le passé.
Si parmi la population et chez certains scientifiques des voix s’élèvent pour dire que la catastrophe nucléaire de Fukushima n’est pas étrangère au phénomène qui frappe la faune locale, aucun lien direct avec les pathologies constatées n’a pu être établi, note toutefois le NOAA.
Touchés par des «particules chaudes» de Fukushima
Un mois plus tôt, lors d’un symposium sur le thème des «dépôts de particules radioactives sur la banquise et les implications sur la santé des animaux et en particulier les phoques qui vivent sur la glace», d’autres scientifiques avaient été, eux, plus formels quant au lien avec Fukushima.
«Les modèles suggèrent que les pinnipèdes (NDLR: phoques, morses et autres mammifères de ce type) peuvent avoir été exposés, lors de leur séjour sur la glace, à des particules chaudes, des fragments de combustible nucléaire. »
Ces particules chaudes, formées par les interactions entre les radionucléides condensés, le combustible nucléaire et des éléments arrachés à la structure du réacteur de la centrale nucléaire japonaise, ont en effet été détectées dans des échantillons d’air prélevés dans le Svalbard, en… Norvège. Soit en quasi droite ligne depuis l’Alaska.
Rien d’étonnant puisque des traces de ces particules chaudes ont aussi été repérées aux États-Unis. Et fin 2012, le Centre des sciences physiques et de la technologie de Vilnius avait publié des résultats d’analyses montrant que, notamment, des traces de césium 137 et de plutonium étaient parvenues jusqu’en Lituanie. Soit après un périple de plus de 8 000 km dans les airs…
Des études qui sortent au compte-gouttes et – peut-être – des phoques malades qui démontrent que c’est au moins tout l’hémisphère nord de la planète qui a été touché par les rejets radioactifs de la centrale de Fukushima. Selon un périple que l’Institut norvégien pour l’étude de la qualité de l’air (Norwegian Institute for Air Research) avait déjà modélisé un mois à peine après la catastrophe.
Source : http://www.lavenir.net/article/detail.aspx?articleid=DMF20140508_00473163&pid=2050936