Par Pantxoa Bimboire* | Publié : 21/10/2013
A l’heure où l’Etat français réduit les investissements dans les grandes infrastructures en raison de déficits abyssaux, les partenariats public-privés pour financer LGV ou grands stades sont appelés à la rescousse. Entrepreneur, élu consulaire, Pantxoa Bimboire pointe les faces cachées de ces PPP.
A l’école prestigieuse des cadres de la république, l’ENA, le centralisme “démocratique” doit être sans nul doute un des préceptes les plus sculptés dans le marbre. Les nombreux préfets qui sont de passage sur le territoire distillent sans dévier d’un pouce leurs déclinaisons et les interdits qui en découlent. Un vient de nous quitter, un autre arrive, peu de changement à prévoir…
Il me serait néanmoins utile de connaître, d’une façon plus générale, les formations reçues par les cadres administratifs, plus particulièrement ceux qui sont destinés aux responsabilités de finances publiques. Déjà dans le passé, lors des augmentations surprises des taux accordés par les banques, nous avons pu constater que les responsables des finances de certaines régions départements ou communautés urbaines étaient peu habitués à lire les alinéas qui évoquent les variations (plus exactement les augmentations) des taux des crédits, plongeant les collectivités dans des situations de déficits fort peu commodes. De la même manière, certaines collectivités, à cette même époque des “subprimes” ont vu leurs placements fondre, après qu’elles ont été bernées par des rendements mal sécurisés.
Une telle légèreté est d’autant plus choquante, qu’on n’en connaît pas toute l’étendue et que les payeurs restent les mêmes : les contribuables solvables.
Clauses sibyllines
Plus près de nous dans le temps, le piège bancaire s’exprime aussi maintenant que l’Etat n’a plus de sous, à travers la procédure PPP (partenariat public privé), à chaque fois que l’Etat décide de grands travaux.
Les prisons, dans l’hexagone, sont depuis au moins 20 ans financées de cette façon et ce sont plus de 500 millions d’euros de location annuelle que l’Etat paye à ces bailleurs constructeurs/financiers. Le besoin actuel de prison supplémentaire (15.000 personnes, au moins une dizaine de prisons) accroîtra encore ces coûts.
L’exemple du financement du tronçon Tours-Bordeaux de la LGV, si j’ai bien lu entre les lignes, est juteux pour le partenaire entrepreneur/banque : il réalise les travaux prévus et les travaux supplémentaires, il encaisse pendant 50 ans les entrées d’argent, il entretient la ligne, mais son résultat d’exploitation est garanti par un engagement des collectivités de combler les déficits possibles. Je doute que le président du Conseil général des PA quand il a, très vite après son élection, accordé 60 millions de contribution, examiné ou fait examiner à la loupe, ces clauses sibyllines, mais sans doute que je me trompe.
Pour une future coupe du monde de football que la France doit organiser, au moins dix stades nécessitent un toilettage ou une nouvelle construction, soit une dépense possible de 5 à 7 milliards si on rajoute les accès et dessertes. La construction des stades de football s’appuie souvent sur un PPP, notamment Lille avec Eiffage pour un montant de 324 millions d’euros et 31 ans de loyers, Bordeaux avec Fayat/Vinci pour 551 millions d’euros et 30 ans de loyers. Seule la ville de Lyon n’est pas rentrée dans ce type de partenariat. Son nouveau stade est entièrement financé par le privé. Les annuités normales des remboursements sont en général de 5 à 10 millions d’euros sur une trentaine d’années, mais bien des municipalités sont prises à la gorge avec des annuités de remboursement mirobolantes (certains taux étant variables, et quelque fois gonflés par des travaux supplémentaires à entreprendre (exemple l’impact de l’application des règles environnementales, souvent grotesques ou sans pré-évaluation de leur impact économique, dans le cas du stade de France). Les gros opérateurs entrepreneurs/banques (véritables pouvoirs dans l’Etat) glissent aussi (comme dans le cas de la ligne LGV) des clauses de sauvegarde de leurs intérêts, comme par exemple une garantie exigée à la municipalité d’un niveau d’entrée de billetterie, surtout si le club redescend en division inférieure (voir le cas du Mans qui n’a plus d’équipe de football et qui dont rembourser l’opérateur). Le contribuable solvable paye.
(……)
*Pantxoa Bimboire
Gérant Sarl (chocolat), conseil de surveillance d’une SA, vice président Chambre de Commerce Bayonne Pays Basque (chargé de l’industrie), élu Chambre de Commerce Régionale (commission finances), administrateur de banque (Société Locale Caisse d’Epargne Pays Basque), adhérent Lantegiak (association des entreprises et entrepreneurs Pays Basque).
Source: http://www.enbata.info/articles/financements-publics-le-piege