Ces dernières semaines ont été ponctuées par diverses communications institutionnelles portant sur la gestion des biodéchets. Mais on constate, encore une fois, l’absence de décision forte en faveur de la collecte sélective des biodéchets des ménages, qui représentent pourtant environ 30 % du poids de nos poubelles.
La Commission européenne a écarté, de nouveau, l’idée de proposer une directive spécifique aux biodéchets.
Dans sa communication du 18 mai dernier, la Commission européenne estime que la législation communautaire existante est suffisante pour optimiser la gestion des biodéchets, notamment en détournant les déchets organiques des centres d’enfouissement. Cette législation, qui définit clairement des objectifs de réduction d’enfouissement des biodéchets, ne donne en revanche aucune indication sur la façon de les gérer plus écologiquement, laissant ainsi une large marge de manœuvre aux Etats membres. De fait, lorsque les biodéchets ont été effectivement détournés des décharges, ils ont été dirigés vers des incinérateurs, solution de facilité souvent retenue mais qui constitue une aberration écologique. La Commission affirme cependant dans cette communication que la prévention des biodéchets, leur collecte sélective, leur compostage et leur méthanisation sont à privilégier, en accord avec la hiérarchie établie dans la directive cadre. Elle souligne en outre que : « Les États membres devraient déployer de sérieux efforts pour mettre en place la collecte séparée afin de parvenir à un recyclage et une digestion anaérobie de qualité élevée. »
Quelques bons élèves comme l’Autriche, l’Italie, la Belgique et les Pays-Bas par exemple, se distinguent avec un taux de valorisation organique des déchets municipaux compris entre 25 et 40 % alors que celui de la France stagne à 15 % (1). On peut donc douter du fait que la législation européenne en place permette d’entrer dans l’ère de la gestion écologique des biodéchets.
Séparer les biodéchets à la source, seul moyen de les traiter efficacement et écologiquement
Le projet de loi Grenelle II demande la mise en place de la collecte sélective des biodéchets des gros producteurs, une première étape, qui permettra à la filière de se structurer. Cependant, on observe de nouveau l’absence de vraie décision concernant la collecte sélective des biodéchets des ménages. Or, nos départements sont en train de se doter d’usines de traitement mécano-biologique (TMB) pour traiter les déchets ménagers (40 projets en cours). L’illusion de la production d’un compost de qualité contribue à cette explosion du TMB. Mais l’ADEME vient, enfin, de publier un avis officiel soulignant l’un des principaux points faibles du TMB.
Florilège : « Retours d’expérience limités et peu probants au regard de la qualité du compost produit (…) », « La production d’un compost conforme aux exigences réglementaires à partir d’ordures ménagères résiduelles impose vraisemblablement des investissements plus lourds et une performance renforcée des installations qu’une production de compost à partir de biodéchets collectés sélectivement. » L’argument du coût, systématiquement mis en avant pour rejeter la collecte sélective des biodéchets, tombe. Sans compter que la Commission européenne prévoit d’établir de nouvelles normes de qualité sur les composts issus de déchets, évolution qui engendrera inévitablement des surcoûts pour améliorer la performance des installations.
Le TMB n’est pas un outil de production de compost valorisable en agriculture. Il sert à stabiliser les déchets avant leur enfouissement. Le changement nécessaire pour instaurer une politique de gestion durable et écologique des biodéchets passe par leur séparation à la source. Osons refaire ce qui a été lancé en 1992 avec les emballages !
Les lois Grenelle ne le prévoient pas et il ne faut pas l’attendre de l’Union européenne. Encore une fois, les cartes sont dans les mains des élus locaux, qui peuvent être les véritables initiateurs de nouvelles politiques publiques écologiques dans nos territoires.
(1) Source : chiffres 2008 publiés par Eurostat
Contact : Hélène Bourges
Source : http://cniid.org/index.php?option=com_content&view=article&id=144&Itemid=21