L'association des naturalistes orléannais lance l'opération "Objectif zéro pesticide dans nos villes et villages". Cette opération est un programme d'accompagnement des communes souhaitant réduire l'usage des pesticides employés pour l'entretien des voiries et des espaces verts, pour atteindre à terme l'objectif zéro pesticide.
Les pesticides en quelques mots
Nous sommes face à une situation à peine crédible. Chaque année en France, nous répandons délibérément près de 80 000 tonnes de substances très polluantes : des pesticides. Nous sommes ainsi le troisième plus gros utilisateur mondial de ces produits, avec pour corollaire, une contamination globale de notre environnement (air, eau, sol).
Les pesticides sont faits pour tuer et leur efficacité est redoutable : par exemple, quelques milliardièmes de grammes d’insecticide peuvent suffire pour tuer une abeille. De surcroît, les pesticides sont peu sélectifs ; ils ont même un spectre d’action plutôt large. Ainsi, il est courant que des herbicides aient aussi une action insecticide tandis qu’un insecticide destiné à tuer tel ravageur va également affecter sans aucune distinction les papillons, les bourdons, et bien d’autres insectes !
Sans surprise, l’usage massif des pesticides en France contribue à l’effondrement de la biodiversité dont les diminutions drastiques des populations d’hirondelles et de papillons sont des symboles (1).
Parallèlement, les pesticides ont un impact sur la santé qui ne fait aucun doute et ils peuvent être classés neurotoxiques, cancérogènes, mutagènes ou encore reprotoxiques, tout en étant encore autorisés à l’emploi ! Même les doses infinitésimales sont potentiellement dangereuses ; ainsi, un seul gramme de pesticide déversé dans un fossé rempli d’eau de 1 mètre de large par 1 mètre de profondeur et 10 kilomètres de longueur rend cette eau impropre à la consommation.
Le Ministère de la Santé, convaincu de la gravité de la situation, met en place dans le cadre de son plan national santé environnement (2004-2008) des actions spécifiques pour prévenir l’exposition aux pesticides (2).
L’usage massif des pesticides est véritablement honteux, mais perdure en raison notamment de l’innommable lobbying effectué par les industries les fabriquant ; il faut dire que les enjeux financiers sont colossaux, et avoisinent les 2 milliards d’euros par an.
Pourquoi les communes ?
Les communes utilisent toutes des pesticides, et tout particulièrement des herbicides, pour l’entretien de la voirie, des espaces verts, des terrains de sport ou encore des cimetières ; les quantités répandues sont non négligeables, plusieurs centaines de tonnes par an en France.
L’usage des pesticides dans les villes et villages présente l’inconvénient majeur d’exposer directement la population –notamment les enfants, à ces substances toxiques. Celles-ci, répandues de surcroît sur des sols pauvres ou imperméables (trottoirs), sont emportées par les premières pluies jusque dans le milieu naturel (rivières) qu’elles polluent.
Enfin, les communes sont des cibles privilégiées pour la suppression des pesticides, car les alternatives sont économiquement et humainement à portée de main.
Des communes difficiles à convaincre
Malgré l’urgence de la situation et le soutien de financeurs, il reste malheureusement difficile de convaincre des communes à s’engager sur la voie du zéro pesticide. Parmi les blocages perçus au niveau des élus, nous retenons :
la peur des « mauvaises herbes » qui donneraient l’impression d’une gestion négligée de la commune,
la peur des dépenses non maîtrisées avec le développement des alternatives aux pesticides,
la peur de perdre le label « villes et villages fleuris » en raison de la présence plus marquée des herbes dites
« mauvaises »,
dans les villages, la peur des réactions de la population agricole, supposée spontanément suspecte vis-à-vis des démarches du type « zéro pesticide »,
le sentiment d’avoir une démarche déjà très satisfaisante, basé sur le postulat de l’usage « raisonné » des pesticides.
Heureusement, nous avons aussi rencontré des équipes municipales qui ont considéré que la santé publique et la qualité de notre environnement sont absolument prioritaires. Ainsi, les communes de Boigny-sur-Bionne, Saint-Hilaire-Saint-Mesmin, Saint-Pryvé-Saint-Mesmin, et probablement aussi Saint-Jean-de-la-Ruelle, ont décidé de signer la charte « objectif zéro pesticide dans nos villes et villages ».
(1) RAMADE François (2005), Eléments d’écologie. Ecologie appliquée, 6ème édition, 864 p.
(2) http://www.sante.gouv.fr/htm/dossiers/pnse/resume_fr.pdf
Source : http://www.aujardin.info/actualite/200611-objectif-zero-pesticide.php