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28 mars 2019 4 28 /03 /mars /2019 11:21

 

 

Dans la bataille que se livrent paysans et multinationales semencières, la biodiversité n’est pas encore vaincue.

Alain KRAUSZ|mediabask|0 commentaires

Différentes variétés de semences sont concernées

Différentes variétés de semences sont concernées

Douze-mille ans que les humains, devenus agriculteurs, s’échangeaient librement leurs semences, partageant ainsi avec les autres leurs propres croisements, adaptations ou sélections pour le bien de tous. Et ce n’est pas dans une mauvaise intention qu’après la Deuxième Guerre mondiale, fut décidé que seules les semences inscrites au Catalogue officiel des espèces et variétés pourraient être cédées. Il fallait procéder à une relance intensive de l’agriculture, afin de nourrir le pays, en privilégiant des semis certifiés possédant un rendement élevé et une bonne homogénéité.

Haut rendement, homogénéité, stabilité… ces critères qui peuvent sembler pourtant positifs sont aussi les caractéristiques des semences récentes issues de l’ingénierie génétique ou d’hybridations, appauvrissant la qualité nutritive et la capacité d’adaptation des plantes, tout en interdisant la possibilité de resemer l’année suivante. Et le siège des (grands) semenciers au comité décidant des inscriptions au catalogue n’est pas pour rien dans sa dérive productiviste.

Certes, une brèche s’est ouverte il y a dix ans lorsqu’un décret a autorisé l’inscription des “races primitives et variétés agricoles naturellement adaptées aux conditions locales et régionales et menacées d’érosion génétique”. Mais la procédure d’inscription est longue et coûteuse, et surtout très aléatoire puisque les critères de rendement et de stabilité, très adaptés au monde des semences clonées, n’ont aucune forme d’objectivité sur les qualités gustatives et nutritionnelles, la capacité d’adaptation aux aléas climatiques et environnementaux, et encore moins sur la biodiversité.

Chez les paysans soucieux de garder un vrai contrôle collectif, les pratiques ancestrales d’échange ont été réinventées afin de se glisser dans les failles de la législation. En effet, il est tout à fait possible de céder des semences… à titre expérimental ! Belle hypocrisie puisque dès la génération suivante, le paysan peut tout à fait replanter et ainsi disposer de ses propres graines. Le Réseau Semences Paysannes, né en 2003 et qui regroupe plus de 70 organisations membres très diversifiées, s’est donné pour missions le développement et la mise en réseau des initiatives favorisant la biodiversité dans les fermes et les jardins, la sensibilisation du grand public sur les enjeux liés à la production et à la commercialisation des semences, et la reconnaissance par la réglementation, des institutions et des laboratoires de recherche des semences paysannes.

Si les professionnels possèdent le savoir-faire et la puissance collective pour organiser une résistance efficace, il n’est pas simple pour un jardinier amateur ou un groupe créant un jardin partagé de se procurer des semences sans en passer par la jardinerie et ses graines industrielles. C’est donc dans ce créneau que l’association Kokopelli a décidé de porter son action en vendant –illégalement– des graines issues des races hors catalogue recueillies par les fondateurs, dans un climat de controverses multiples qui en dit long sur la sensibilité de l’enjeu.

 

– Renseignements : http://semencespaysannes.org ; http://kokopelli-semences.fr

 

Source : https://mediabask.naiz.eus/fr/info_mbsk/20180328/la-liberte-des-semences-un-enjeu-social-et-economique

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