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7 juillet 2016 4 07 /07 /juillet /2016 09:51

 

 

Michel Waintrop, le 30/06/2016 à 14h35

La LGV Est rappelle la fragilité du modèle économique du TGV

106 kilomètres de ligne à grande vitesse ont été mis en service en avril 2016 entre Baudrecourt (Moselle) and Vendenheim (Bas-Rhin) / Patrick Hertzog/Afp

 

L’ouverture le 3 juillet d’une nouvelle ligne à grande vitesse met Strasbourg à moins de deux heures de Paris. Mais la rentabilité du TGV n’a cessé de s’éroder depuis 2008

 

Dimanche 3 juillet, la carte de France redessinée selon les temps de transport entre les principales villes verra les frontières de l’Est se rapprocher de Paris. Avec l’ouverture de la deuxième phase de la ligne à grande vitesse (LGV) Est, la capitale sera alors à moins de 1 h 50 de Strasbourg. Les 106 km de nouvelles voies constituent en effet une prolongation de la LGV mise en service en juin 2007. Le parcours entre les deux villes est ainsi raccourci d’une demi-heure.

 

L’ouverture se déroule avec trois mois de retard, en raison de la catastrophe d’Eckwersheim, à une dizaine de kilomètres de Strasbourg. Le 14 novembre 2015, le déraillement d’une rame d’essai avait entraîné la mort de 11 personnes et fait une quarantaine de blessés.

 

> A lire : Accident du TGV, la vitesse en cause

 

Ce nouvel investissement, d’un montant de 2 milliards d’euros – versés à 34 % par l’État et à 32 % par les collectivités locales – laisse dubitatif Yves Crozet, professeur au Laboratoire aménagement économie transports (LAET) de l’Université de Lyon. « Il semble que cet axe ne rencontre pas un grand succès de fréquentation », dit-il, ne trouvant pas « évident » la nécessité de ce tronçon au vu du gain horaire.

 

Une évolution « très raisonnable » des tarifs

Consciente de l’enjeu, la SNCF promet une évolution « très raisonnable » des tarifs. En mai, Éric Vande Gehuchte, directeur de l’axe TGV-Est, indiquait que les prix resteraient inchangés pour les destinations ne bénéficiant pas d’un gain de temps, et que les hausses seraient limitées à 3 euros en moyenne pour les autres.

 

> A lire : L’échange des billets TGV va devenir payant

 

La SNCF espère faire passer la fréquentation annuelle de 12 millions aujourd’hui à 12,8 millions d’ici à 2020. La compagnie table notamment sur le développement des voyages d’affaires, les liens avec des capitales européennes, et l’arrêt des vols directs d’Air France sur ces liaisons depuis le mois d’avril.

 

« Cette ligne illustre une rupture dans le modèle économique de la grande vitesse ferroviaire. Elle est la première pour laquelle il a fallu faire un tour de table pour boucler le financement », souligne Yves Crozet, rappelant qu’autrefois, la quasi-intégralité des financements pour une LGV provenait de Réseau ferré de France (RFF).

 

« Le TGV a perdu la pertinence de son modèle économique »

« Avec l’interdiction pour RFF d’investir quand un retour sur investissement n’est pas garanti par les péages payés par les trains, il a fallu passer d’un modèle basé sur la rentabilité à un modèle subventionné par l’État et les collectivités locales », dit Yves Crozet.

 

« Cette deuxième phase a été décidée en 2008 par les pouvoirs publics avec trois autres LGV : la Sud-Est Atlantique, avec Tours-Bordeaux, le contournement Nîmes-Montpellier et la ligne Bretagne-Pays de la Loire, rappelle Yves Crozet. Pour chacune, le principe financier est le même. En quelques années, le TGV a perdu la pertinence de son modèle économique, surtout en période de faible croissance. »

 

Sont en cause la baisse de 10 % du nombre de voyages d’affaires depuis 2008 – les voyageurs les plus rentables –, mais aussi la concurrence de plus en plus importante des vols low cost, du covoiturage et des autocars.

 

Selon le chercheur du LAET, le trafic TGV reste quasiment stable depuis sept ans, alors qu’il augmentait de 3 à 4 % par an auparavant. La rentabilité de ce fleuron du ferroviaire n’a cessé de s’éroder, chutant de près de 29 % en 2008 à 12 % en 2013.

 

Dans un rapport très critique en 2014, la Cour des comptes a évoqué un modèle économique « à bout de souffle ». Avec notamment pour conséquence, la dépréciation de plus de 2 milliards d’euros exercée par la SNCF sur ses trains à grande vitesse dans ses comptes 2015.

 

 

Source : http://www.la-croix.com/Economie/La-LGV-Est-rappelle-la-fragilite-du-modele-economique-du-TGV-2016-06-30-1200772609

 

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