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7 mai 2016 6 07 /05 /mai /2016 07:09

 

 

Publié le 19/02/2016 à 15:58

Les pouvoirs publics ont dissimulé un rapport défavorable au transfert de l'actuel aéroport de Nantes.

©  Photos LOIC VENANCE / AF

© Photos LOIC VENANCE / AF

On savait le référendum à propos de Notre-Dame-des-Landes très mal parti pour des raisons à la fois juridiques et politiques (voir la Vie N°3677 du 18 février) mais là c'est encore pire. Dans son édition du 17 février, le Canard Enchaîné a, en effet, révélé que l'Etat a non seulement gardé secret un document essentiel pour la compréhension du dossier mais a utilisé, par la voix du premier ministre, des arguments totalement contraires à son contenu

 

En effet, depuis toujours les partisans du transfert de l'actuel aéroport de Nantes-Atlantique à Notre-Dame-des-Landes martèlent un argument « écologique » : les activités de l'actuel aéroport, situé à Bouguenais, à proximité de Nantes, seraient nocives pour la réserve naturelle du lac de Grand-Lieu, située à quelques kilomètres du bout des pistes de Nantes-Atlantique. Cette réserve, classée Natura 2000, s'étend, en effet, sur 6.000 hectares et abrite quantité d'espèces protégées (spatules blanches, héron cendré, loutres...).

 

Pour en avoir le cœur net et sans doute dans l'espoir de conforter les arguments en faveur du transfert de l'aéroport, la préfecture de la région des Pays de la Loire avait commandé en 2014 un rapport à ses propres experts de la Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) des pays de Loire sur l'impact d'une éventuelle extension de la piste de Nantes-Atlantique. Selon les extraits du document publié par le Canard Enchaîné – et publié également et en intégralité par Ouest France dans son édition nantaise du 17 février (lire ici) – Xavier Hindermeyer, le chef du département de la Dréal, indique dans un courrier adressé le 19 septembre 2014 au Préfet de région « que le rallongement des pistes actuelles ne présente pas de risque pour la faune de la réserve naturelle et n'augmente pas le péril aviaire. Au contraire, note le document de deux pages et très argumenté, elle garantit la préservation des zones humides générée par l'aéroport qui participent à l'équilibre écologique de la réserve face à l'urbanisation de l'agglomération nantaise ».

 

Cette étude accablante pour les partisans du transfert de l'aéroport de Nantes Atlantique (qui lui entraînerait bien la destruction de plusieurs centaines hectares de zones humides à Notre-Dame-des-Landes) n'a jamais été rendu public. Pire, dans un débat au Sénat, le 15 octobre 2015 Manuel Valls, reprenant des éléments de langage de l'association « Ailes d' Ouest » (très favorable au transfert) le premier ministre, a dit exactement le contraire du contenu du rapport de la Dréal ! « L'actuel aéroport est au contact de trois zones Natura 2000, il n'est pas donc souhaitable de l'étendre pour des raisons environnementales », a ainsi osé affirmer le premier ministre devant les sénateurs

 

Manuel Valls pouvait-il ignorer à ce point les arguments contenus dans la note de la Dréal ? En tout cas, plus maintenant. Car, Le Monde vient de révéler que Loïc Marion, directeur de la réserve de Grand Lieu pendant 23 ans, lui avait adressé un courrier personnel le 28 octobre 2015. Dans ce courrier, dont le Monde publie des extraits dans son édition du 20 février 2016, Loïc Marion écrit noir sur blanc à Manuel Valls : « Je n'ai jamais constaté la moindre gêne des oiseaux de ce lac due aux avions utilisant l'aéroport actuel de Nantes-Atlantique (…). Tout au contraire, l'abandon de Nantes-Atlantique constitue une menace bien réelle pour le lac de Grand Lieu, dans la mesure où ses périmètres de protection (réserve naturelle, site classé Natura 2000) ont été définis au plus juste près du lac, en tenant compte de la protection de fait assurée par le périmètre de la protection antibruit de l'aéroport (…). Le déplacement de l'aéroport mettrait fin à cette protection et des élus locaux n'attendent d'ailleurs que cette issue pour pouvoir urbaniser tout ou partie de ce corridor ». Bref, à en croire à la fois la Dréal et le directeur de la réserve de Grand Lieu, le transfert de l'aéroport à Notre-Dame-des Landes ne peut avoir aucune justification « écologique ».

 

Avec cette révélation, la tenue d'un référendum sur le transfert de l'aéroport paraît de plus en plus compromise. Comment, en effet, inviter la population à s'exprimer sur un projet contesté et contestable si les pouvoirs publics en dissimulent des pièces essentielles à sa bonne compréhension ? Et il serait d'ailleurs étonnant que les opposants à l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes n'utilisent pas ces révélations et ne déposent pas plainte contre l'Etat pour dissimulation de documents. Ainsi, France Nature Environnement estime dans un communiqué que « la dissimulation qui a été faite de ce document est insupportable et inacceptable. Elle confirme que ce dossier d’aéroport a été instruit dans la plus grande opacité, si bien que les différentes phases de concertation avec le public n’ont jamais été que poudre aux yeux. Combien d’autres analyses défavorables au projet sont encore gardées secrètes par l’Etat ? Nous exigeons que tous les documents utiles à la compréhension du dossier soient enfin mis sur la table. L’hypothétique référendum à venir ne saurait être organisé sur le fondement d’un mensonge d’État »


Pour les pouvoirs publics, la seule porte de sortie semble être désormais le rapport sur « les options alternatives au transfert de l'aéroport à Notre-Dame-des Landes » commandé par Ségolène Royal à ses services. La ministre de l’Ecologie, qui cache de moins en moins on opposition à la construction de l'aéroport Notre-Dame-des-Landes, s'est en effet engagée à ce que ce rapport soit rendu public avant le 31 mars. De plus, en annonçant la tenue de la 4e conférence environnementale les 13 et 14 avril 2016, elle a affirmé « que le rapport sur Notre-Dame-des-Landes y sera sur la table ». Pour annoncer son abandon ? Cela apparaît de plus en plus comme la seule voie encore raisonnable – même si elle aura un coût financier car Vinci ne se privera pas d'exiger un dédommagement - pour mettre fin à un conflit qui empoisonne le département de la Loire-Atlantique depuis presque 50 ans.

 

 

Source : http://www.lavie.fr/blog/olivier-nouaillas/notre-dame-des-landes-un-mensonge-d-etat,4606

 

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