Gaëlle Lucas, journaliste, correspondante à Madrid le 21 juillet 2015 Les Echos
Le concessionnaire de l'infrastructure, TP Ferro, n'est pas parvenu à renégocier sa dette.
En cas de faillite, les Etats français et espagnol pourraient devoir l'assumer.
Les wagons à deux étages du train à grande vitesse qui relie Barcelone à Paris étaient encore bondés samedi 19 juillet. Des touristes français, espagnols, anglais, voire américains, regardent défiler le paysage sans se douter que TP Ferro, le concessionnaire de la ligne de train à grande vitesse entre Figueras et Perpignan inaugurée en fanfare par les gouvernements espagnol et français en décembre 2013, a jeté l'éponge la veille. Faute d'accord avec ses créanciers pour restructurer une dette de plus de 400 millions d'euros, la société contrôlée à 50-50 par Eiffage et le groupe espagnol ACS, a annoncé sa mise sous administration judiciaire.
Une rentabilité mise à mal
Un tel dénouement était attendu après le pré dépôt de bilan annoncé en mars. Le délai de quatre mois offert à TP Ferro, à ses créanciers ainsi qu'à ses concédants, l'Etat espagnol et l'Etat français, pour se mettre d'accord a été insuffisant.
Néanmoins, Eiffage, dans un communiqué, a affirmé vouloir trouver « une solution pérenne à la précarité actuelle et non soutenable de son modèle économique ». La rentabilité du projet, qui a coûté 1,2 milliard d'euros, est en effet mise à mal par plusieurs facteurs. D'abord, par le retard pris pour la mise en service effective de la ligne. L'infrastructure avait été réalisée dans les temps par le consortium, en 2009. Néanmoins, le raccordement au réseau à grande vitesse espagnol a attendu quatre années supplémentaires et la ligne n'a été inaugurée qu'en décembre 2013. Pour ce retard, TP Ferro avait été indemnisé et la concession avait été allongée de trois ans, à cinquante-trois ans. Cela n'a pas empêché Eiffage et ACS de déposer une demande d'arbitrage contre la France et l'Espagne en 2014.
Faible trafic
Surtout, TP Ferro se plaint du faible trafic sur sa ligne, qui s'élève actuellement à 32 trains de marchandises et 70 trains de passagers par semaine. Une offre qui serait « très inférieure aux engagements » de la SNCF et de la Renfe, son homologue espagnol, d'après Eiffage. Le groupe incrimine aussi « l'absence de concurrence faute de libéralisation du secteur et la crise économique » espagnole.
Pour l'instant, les trains vont continuer à circuler entre la France et l'Espagne. Parallèlement, TP Ferro va reprendre les négociations afin de trouver une solution au problème de sa dette. S'il échoue et fait faillite, les Etats français et espagnol pourraient devoir assumer la dette associée à la concession, d'après la presse espagnole.
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http://www.batiactu.com/edito/une-filiale-espagnole-d-eiffage-depose-le-bilan--41781.php
http://www.constructioncayola.com/rail/article/2015/07/21/101207/lgv-barceloneparis-heure-bilan.php